Elle joue. Séduit puis jette. Toujours le même cirque. Il est une conception désirée, un atout qu'elle se garde. Il est sa police d'assurance vers un avenir serein. Elle vient avec ce nouveau-né dans les bras, l'abandonne un peu chez celui qu'elle désigna comme le père. Monsieur Uehara se retrouve alors avec un enfant. Personne ne questionne la paternité, ni les dires de la mère. C'est pour ça qu'il le considère comme son fils, l'élève sous son toit. Non, Junji n'a pas été accepté par Madame Uehara. Il est la preuve d'une infidélité, apparemment. Comment aimer un enfant qui n'est même pas le sien ? Junji reste pourtant dans ce foyer, s'attache aux membres même si ce n'est pas toujours réciproque. Pourtant, on lui rappelle toujours que sa mère est ailleurs. Il la voit parfois. Celle-ci fait sa vie, ses plans et arnaques comme elle l'entend.

Junji grandit donc chez les Uehara. Il est encore chez eux lorsque Nao naît. Et les années passent. Chez eux, ça devient aussi chez lui. Après tout, c'est le seul foyer qu'il a connu. Junji passe beaucoup de temps avec Nao. Ils n'ont pas tant d'années d'écart et c'est naturellement que les choses se font. Sauf que sa génitrice finit par revenir. Oui, il a sept ans lorsqu'elle toque à nouveau à la porte et elle ne dit qu'une chose : elle veut le récupérer. Et ça arrange Madame Uehara, l'intrus pourrait disparaître. Sauf que Monsieur Uehara, lui, croit que c'est son fils. Il l'a traité comme tel durant ces sept années. Pourtant, il cédera. Oui, devant le caprice de cette ancienne maîtresse désormais mariée. Itô, Madame Itô. Elle n'arbore plus cette expression de femme anéantie. Son sourire est carnassier, il brille autant que la bague qu'elle porte à l'annuaire. Et c'est ainsi qu'elle le reprend. Junji est son enfant et elle a désormais les moyens de l'élever.

C'est le cœur lourd qu'il lâche la main de cet enfant, quitte celui qu'il a appelé papa, celle qu'il a tout de même aimée même sans lien entre eux. Oui et c'est ainsi que Junji quitte la maison des Uehara, disparaît en Corée avec sa mère. Celle-ci a épousé un riche homme d'affaires japonais implanté en Corée. Il a une société aux bénéfices impressionnants et son infertilité faisait qu'il était prêt à élever l'enfant d'un autre comme le sien. Il a accepté Junji comme s'il était sa propre chair. Il a fait de lui un Itô et c'est ainsi que l'arnaqueuse s'est construite une vie enviable.

Junji a fini par oublier le passé. Les prénoms, les souvenirs. Tout est désormais flou, on lui a dit de ne plus en parler. Il a refait sa vie, a grandi avec ce nouveau père et sa mère. Et le voilà aujourd'hui, fils Itô. Etudiant presque modèle et juste lui-même. Une vie banale, loin de cette enfance différente des autres. Junji vit sans trop penser à l'avenir. Il joue, après tout la vie n'est qu'un jeu auquel on doit s'adonner.