Sometimes it doesn't matter how prepared you are. It doesn't matter how many times you repeated those accords. It doesn't matter how much you perfected your representation. Cause there will be one thing that you never thought about. One. Simple. Thing.

Tu étais nerveuse. Qui ne le serait pas après tout? C'était ta première représentation un tant soit peu officielle à Séoul, alors tu voulais faire ça bien. Tu avais réussi à convaincre le propriétaire du bar de te laisser jouer, et ça n'avait pas été une mince affaire! Du coup, tu avais passé la journée entière à répéter pour être sûre que tout soit parfait. Tu n'avais omis aucun détail. Tu maîtrisais ton sujet, et tu étais fin prête. Du moins, tu le croyais. Il y avait pas mal de monde, sans que ce soit bondé pour autant. Étonnamment, là où ça aurait pu en impressionner certains, toi, ça te mettait plus à l'aise qu'autre chose. Les effluves des quelques cocktails en préparation envahissait les lieux. Les rires et les conversations se confondaient en un brouhaha incompréhensible, se couvrant les uns les autres. Prenant place sur la petite scène, tu prenais le temps d'accorder ta guitare, vérifiant les branchements du micro et des amplis. Il y avait bien des employés pour t'aider, mais tu aimais le faire toi-même, c'était ton rituel avant de commencer. Ça te mettait en condition optimale. Certaines personnes se trouvant proches de la scène t'observaient attentivement, curieux de savoir qui tu pouvais bien être et ce que tu allais leur chanter. Ce fut quand tu avais finalement terminé ton installation que tu fis un signe de tête au propriétaire qui te donna la permission de te lancer. Allons-y. Micro allumé, tu fis quelques tests, attirant les regards du reste du bar. Tu te contentais de sourire devant tous ses yeux braqués sur toi, te présentant et remerciant ton nouveau public de leur attention. Puis les premières notes de ta guitare fit silence, et ta voix s'éleva dans l'air. Tu avais choisis d'interpréter Galway Girl d'Ed Sheeran. C'était une chanson qui donnait envie de bouger et que tu aimais beaucoup chanter. Et ça devait se voir, parce que rapidement les gens autour de toi se mirent à taper des mains en cœur, t'accompagnant volontiers sur la mélodie. C'était un bon choix, tu étais fière de toi. Tout se passait à merveille, et même encore mieux que ça. Seulement voilà, il fallait croire que même préparée à tout, l'imprévu finit toujours par vous surprendre. Et ce soir, il avait le visage d'un jeune homme bien éméché qui semblait décidé à participer lui aussi....

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L’amour, la bienveillance et le partage, voilà tout ce qui m’anime en rentrant dans ce bar. Fini le loup solitaire qui erre dans les rues à la recherche d’une proie ! De toute façon, la démarche du carnivore n’est plus aussi rayonnante si on la compare à celle du début de la soirée. Mes comparses m’ont abandonné depuis un quart d’heure et je ne m’en plains pas. En effet, j’aperçois tant bien que mal  une demoiselle installer son matériel de musique sur scène, ce qui garantit un divertissement optimal. Commençant les festivités sans tarder, je commande un verre de whisky pour avoir le cœur bien accroché. Après quelques minutes de dégustation à goût prononcé, je me retrouve complètement surpris par le son du micro. Elle se met à chanter et parviens à capter son public. Pas tous mais les plus assidus frappent dans leurs mains avec un certain entrain. De mon côté, je me contente de lever mon verre avant que la curiosité cachée sous une tonne de débilité me fasse lever. Le tout doublé par mon esprit alcoolisé, je rejoins les rangs des premiers de la classe après avoir renversé une partie de ma boisson sur une demoiselle dont le visage traduit rapidement son agacement. Au lieu de lui présenter mes excuses comme le ferait le solaire Han Yul présent uniquement la journée (horaires de fonctionnaire, bonjour), je réagis d’un ton susceptible d’entraîner des polémiques. « Ah ! Il fait chaud par ici ! » M’attendant à un retour de flammes, l’inconnue préfère m’ignorer. Je ne pensais pas avoir une mine aussi pitoyable. Enfin, j’arrive près du spectacle du singe que nous offre la pseudo-chanteuse. Ou alors, serait-ce plutôt mon reflet et mon écho qui ruinent cette belle prestation. Le second couplet est là mais avec un train de retard, je hurle les paroles du refrain dans un anglais évidemment approximatif. Ce n’est pas la première fois qu’un ivrogne est pitoyable alors elle passera certainement outre, pour le moment …

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Bon sang. T'avais aucune idée de ce que t'avais fait pour mériter ça. Tout avait si bien commencé, pourquoi avait-il fallu que tout soit gâché aussi facilement? Cette voix rauque de mec qui avait évidemment trop bu faisait interférence avec ta prestation. Si seulement il ne gueulait pas aussi fort, ça pourrait passer. Mais même les gens autour de lui semblaient agacés. Il te semblait d'ailleurs l'avoir vu renverser son verre sur une jeune femme au milieu de la foule. En temps normal, tu serais heureuse de voir quelqu'un chanter avec toi. Mais cet énergumène en tenait une trop grosse couche pour ne pas être agaçant au plus haut point. T'avais jamais été du genre violente, t'étais même quelqu'un de très pacifique, mais là, sur l'instant, tu lui aurais volontiers jeté ta guitare sur la tête. Heureusement pour lui, tu tenais beaucoup trop à celle-ci pour aller l'abîmer sur le crâne d'un ivrogne. Alors tu prenais sur toi et faisais bonne figure, essayant de couvrir le massacre en chantant et jouant un peu plus fort. T'avais même lancé un regard suppliant au patron pour qu'il fasse quelque chose, mais ce dernier semblait plus préoccupé par le service de ses clients que par l'élément perturbateur au devant de la scène. Soit. Tu allais devoir faire avec pour la fin de la chanson. Tu t'étais même surprise à prier pour qu'il s'en aille piquer un somme dans un coin, ou pour que quelqu'un l'invite à boire un coup au bar. Tout, et n'importe quoi, mais pourvu qu'il arrête son cirque. Étonnamment, très peu de personnes s'en allèrent à cause du désagrément, et un petit cercle de sécurité s'était dessiné autour de lui, comme si tout le monde s'était résigné à le laisser en paix. Oh mais c'était mal te connaître. Une, deux, trois chansons, et c'était fini. Avec ce choriste indésirable, ça t'avait paru durer une éternité infernale, Lucifer lui-même ne pourrait trouver de pire châtiment pour toi. Tu remercias ton public, lançant un regard électrique au jeune homme qui venait de gâcher ta prestation. Était-il seulement conscient de ce qu'il venait de faire? Tu en doutais. Mais s'il pensais s'en tirer comme ça, il allait vite déchanter, c'était le cas de le dire. Tu descendis de scène et fonças droit sur ta cible toute désignée. Quelques uns te félicitèrent sur ton passage, et tu leur souris avec joie, mais dans tes yeux ils pouvaient y apercevoir une colère sourde qu'il ne valait mieux pas attiser. Tu abordas finalement la source de tes drames sans plus attendre, sentant le regard de quelques personnes autour de vous, peut-être percevaient-elles la tempête qui approchait? Tapotant sur l'épaule du jeune homme éméché, tu tentais un sourire crispé. « Dites, vous savez que vous venez de ruiner ma prestation? » Tu te retenais autant que tu le pouvais, tu voulais pas être impolie, mais c'était pas l'envie qui t'en manquait. Tu te forçais à respirer calmement, et ça se voyait comme le nez au milieu de la figure que t'étais prête à exploser d'une seconde à l'autre. Si encore il s'excusait et avait un semblant de remord, tout irait bien. Si seulement...

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Ma voix porte mais elle déraille facilement. Ma gorge est intoxiquée par la fumée inspirée, mes cordes vocales sont épuisées par les cris enchaînés lors des nombreuses soirées arrosées, mais, je tente de chanter avec cette demoiselle, chanceuse par son talent, malchanceuse par mon arrivée. J'aurais pu passer mon chemin mais j'étais venu vers elle, sans crainte, ni complot. Je voulais juste m'amuser mais je n'applique pas les bonnes méthodes, oubliant les règles du jeu exigées par la notion même du respect. Celui-ci, au même titre que la modération, prend la poussière dans un grenier dont j'ai oublié l'accès.

Continuant ma contre-performance, j'enchaîne des paroles avec un anglais ridicule. Mon séjour en Australie commence à se faire loin ou peut-être que je ne suis pas apte d'être bilingue dans ce type de circonstances. Qu'importe, je décide de compenser en gesticulant, car oui, on ne peut pas considérer mes mouvements de bassin comme de la danse. Je ne prête même pas la moindre attention aux personnes autour, qu'elles me regardent ou non. J'ai cessé de porter mon regard sur autrui depuis bien longtemps. De toute façon, mon champ de vision est trop trouble pour différencier les silhouettes que je croise. Je constate maladroitement que certaines personnes continuent d'encourager la jeune femme, du moins, lors des deux premières chansons. Parce que oui, je ne me décourage pas et au lieu de perdre en énergie, ma voix gagne en force. A moins que cela soit dû au désespoir de la jeune artiste qui veut battre en retraite ? Je ne sais pas. Je finis par deviner la fin du spectacle quelques minutes plus tard, quand la jolie s'approche de moi, les manches presque remontées. Ou pas. Je me retourne, parvient à la reconnaître quand elle me tapote l'épaule. « Quoi ? C'est déjà fini ? » Je lâche un profond soupir, qui, risque de la faire tomber à la renverse vu ma forte haleine.  « C'est quoi cette question ? Je m'amusais juste. Il faut se détendre. » Je fronce les sourcils. Je l'accompagne et elle n'apprécie pas mon intervention ? Qu'est-ce qu'elle peut être constipée. Je ne réalise pas forcément mes actes, enchaînant les conneries comme je sais tant bien le faire. « J'ai essayé de mettre un peu de vie dans votre performance. On est dans un bar, pas dans une maison de retraite. » Je me permets même de la critiquer avec un sourire moqueur sur les lèvres. Finalement, j'ai ma réponse pour tout à l'heure : ce n'était pas l'alcool et mon intervention qui avaient rendu son spectacle en un numéro de singe... Elle manquait de cœur quand elle chantait. Ou pas.

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C'était pas dans tes habitudes de réagir comme ça, mais c'était pas non plus dans tes habitudes de voir tes prestations parasitées de la sorte. Tu avais travaillé tellement dur pour ce soir-là. C'était la première fois que tu te produisais sur une scène à Séoul, tu y tenais énormément à cette soirée. Et la voilà gâchée. C'était pas la première fois que tu jouais dans un bar, ni que quelqu'un de fortement alcoolisé se joignait à toi pour chanter. Mais cette fois-ci, c'était beaucoup trop important pour toi. Ton perfectionnisme t'avait fait la vie dur pendant de longues heures, si bien que le stress et la pression s'étaient accumulés, et ce pauvre bougre allait en faire les frais. Il sentait l'alcool à plusieurs mètres, et au vu de ses jambes qui semblaient le maintenir aléatoirement, il devait être imbibé jusqu'à la moelle. Il semblait avoir ton âge, et l'espace d'un instant, ça te fit de la peine de voir quelqu'un se mettre dans un état pareil. Oui, un court moment, tu te demandas ce qu'il pouvait bien vouloir oublier pour boire autant. Un très, très court un instant. En fait, juste le temps pour lui d'ouvrir la bouche et de parler. Mettre de la vie dans sa performance? Une maison de retraite? Tu ne pus retenir un soupir outré, trop choquée pour dire quoi que ce soit sur le champ. Il était sérieux là? Et ce sourire moqueur. T'en avais trop vu des comme celui-là. Ces sourires trop fiers de vous rabaisser plus bas que terre. Ça te rappelait de mauvais souvenirs. Tu souris  à ton tour, malgré toi, un sourire forcé et amer. « Vous avez totalement raison, nous sommes dans un bar... » Tu te tournas vers le bar et tandis le bras pour attraper une choppe encore presque pleine, te moquant éperdument d'à qui elle pouvait bien appartenir. Puis tu fis de nouveau face à ton interlocuteur ivre, ton sourire encore plaqué sur ton visage. « Vous devriez donc reprendre un verre...! » Et sur ces mots, tu lui vidas la choppe en pleine tête, provoquant un mouvement de foule qui s'écarta de vous deux. T'étais pas violente, tu l'avais jamais été, pourtant c'était parti tout seul. Tu plantas tes yeux noirs dans les siens. « Un de plus ou de moins, pour vous ça fera pas de différence. » T'étais pas fière de toi, mais sur le coup, ça t'avait défoulée. Tu reposas la choppe sur le comptoir d'un geste sec, sans voir au loin le patron qui se rapprochait de vous.

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Jouer les durs est une chose, être insupportable en est une autre. Avec le cinéma que je viens d'offrir aux autres clients du bar, je suis presque conscient d'avoir touché ma cible en plein coeur. Pourtant, ce n'était pas mon objectif, n'ayant aucune conscience de mes agissements. Du moins, c'était le cas au début. En effet, lorsque la jeune femme débarque devant moi, je décide de rajouter de l'huile sur le feu, appréciant mon comportement de véritable emmerdeur. Les provocations font parties de mes domaines de prédilection. Je ne veux donner aucune chance à mon adversaire. Je ne connais rien de la chanteuse, et c'est sûrement une bonne fifille mais j'ai besoin de jouer avec le danger, de blesser les gens pour espérer qu'ils souffrent autant que moi. Je ne dis pas que le raisonnement est logique mais nous sommes humains. Nous ne pouvons pas être vus comme des théorèmes, comme des robots... Un robot aurait pu voir le geste de la jeune femme. Il aurait beaucoup moins supporté ce vilain coup. Cette fois-ci, je suis complètement noyé, c'est clair et net. Et bizarrement, je n'apprécie pas l'idée ... Je perds rapidement mon sourire et respire fort à plusieurs reprises pour tenter de me calmer mais c'est impossible. Je râle et l'insulte sous le coup de la colère, ce qui est quand même compréhensible. Qui apprécierait d'être dans mon état ?  " Je peux savoir ce qui te prend, connasse ?! " Je mets mes bras en parallèle, les lève avant de les agiter avec force. On pourrait presque voir un chien qui se secoue les poils en sortant de l'eau. Le pire, c'est qu'avec l'alcool, je suis à deux doigts de me transformer en bonbon, tellement, je suis collant. Qui récolte le vent, sème la tempête. Je n'ai pas le temps de m'exprimer qu'un homme de la quarantaine s'approche de nous. A sa tête, je devine qu'il s'agit du patron. " Qu'est-ce qui se passe ici ? " Son visage est fermé et froid. Il appuie son regard sur la demoiselle et j'en profite pour reprendre la parole. J'espère qu'il ne va pas s'imaginer des trucs... " Monsieur. Je crois que vos employés ont trouvé une nouvelle méthode pour accueillir vos clients...  " Pauvre petit Han Yul.

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Aussitôt arrosé, aussitôt l'insulte sort. Mais c'est à peine si elle te fait hausser un sourcil. Ça n'a jamais été le genre de choses qui puissent t'atteindre. Tu le jauges sans merci, lui qui est maintenant autant imbibé d'alcool à l'intérieur qu'à l'extérieur. T'entends des rires étouffés autour de vous, ainsi que des exclamations et des chuchotements d'étonnement. Et tu continues de le fixer sans remords. Si tes yeux pouvaient lancer des éclairs, il serait devenu une torche humaine en moins d'une seconde. Il se met en colère, mais ça t'impressionne même pas, ta colère à toi t'empêchant de voir les choses comme elles le sont. C'est comme combattre le feu par le feu. Tu lui réponds même pas, pas la peine. Et quand la voix du patron s'élève derrière toi, ça te fait légèrement sursauter. Il te fixe sévèrement et t'es prête à expliquer la situation, mais voilà que l'autre te prend de vitesse. Sérieusement? Tu pouffes, agacée et outrée. « Je suis pas une employée. » Tu fais que chanter, y a pas de contract pour ça. « Non. Et si c'était le cas tu serais virée. Maintenant t'as intérêt à t'excuser pour cet incident. » Alors là c'était le bouquet. Il prenait sa défense. Tu oublies totalement ton ancien adversaire pour te tourner vers le patron. « Vous plaisantez j'espère?! Il l'a cherché! S'il faut des excuses, c'est plutôt à lui de les faire. » Plantée sur tes pieds, tu refuses de te laisser impressionner tandis qu'une véritable arène se dessine autour de la scène. « Dans c'cas la porte c'est de c'côté, et j'veux plus te voir ici, c'est compris? » Tu ris. Amère et incrédule. « Vous pouvez pas être sérieux... y a pas une seule personne qui ne l'évite pas dans ce bar! » Tu cherches du soutien auprès des gens qui vous entourent. Ceux-là même sur qui il a à moitié renversé son verre quelques minutes avant. Ceux-là même qui semblaient importunés par sa présence. Mais rien. Des regards fuyants. T'es toute seule. Et tu soupires, exaspérée. Tu demandes pas ton reste, tu fonces vers la scène et récupères tout ton matériel à la vitesse de la lumière. Un silence de mort plane sur le bar, tout le monde t'observe, tu le sens, et t'as envie de hurler. Mais tu serres les dents et redescends avec tes affaires. Tu t'arrêtes devant le patron. « Au fond ça m'étonne pas que vous preniez sa défense, à lui seul il doit bien faire la moitié de votre chiffre d'affaire, hein? » T'es rarement aussi mesquine, la colère te fait dire des choses que tu penses pas, que tu regretteras quand le soleil sera levé. Tu lances un dernier regard à la pauvre victime, et son allure de chien mouillé prêt à mordre. Et tu te diriges vers la porte. Et alors que tu la passes à peine, un coup du destin, ou un revers du karma. Un de tes talons te fait défaut, et tu manques de te tordre la cheville et de tomber face contre terre. Il manquait plus que ça...

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Eméché, l'intervention du patron n'est pas une surprise contrairement à l'intervention de cette dite employée. Décidé à me venger, cette histoire ne prendra pas fin mais autant la tourner à mon avantage au maximum. Alors, avec le minimum de clarté qu'il me reste, je l'informe de la responsabilité de mon état. Je ne voudrais pas qu'il me demande de nettoyer. Dans tous les cas, je ne serais pas en mesure de le faire. Je risque de me confondre avec la serpillière vu l'état de mes vêtements et de mon visage. Il est évident que le gérant a senti l'odeur de l'alcool depuis plusieurs mètres. Il prend tout de même ma défense. Certes, je suis conscient que je ne vais pas pouvoir m'éterniser ici, ayant semé le bordel dans son bar. Or, l'incident est à l'origine de la jeune femme. Devenant sage pour la première fois de la soirée, je me contente de rester planté là sans manquer une seule seconde de leur discussion. Je tâche d'éviter de rire, bien que cette sensation s'échappe à partir du moment où je l'entends dire: y a pas une seule personne qui ne l'évite pas dans ce bar. Suis-je un clochard aux yeux des gens ? Suis-je un pauvre looser à qui on ne veut pas adresser la parole ? Voilà mon semblant de quotidien. Malheureusement, ce questionnement sera oublié dés demain matin et ma reprise en mains sera remis à plus tard, un colis non expédié que le propriétaire ne réclamera jamais. Mon regard s'endurcit et suit toujours la direction de la jeune femme, qui trace sa route vers la sortie après une dernière tirade digne d'une pièce de théâtre dramatique. Malheureusement pour elle, la chute de cette histoire se traduit par un point culminant digne des films comiques cette fois-ci. Je me retourne vers le patron. Je n'en ai pas fini avec elle. " Bien. Ne vous inquiétez pas, je vais m'en aller. Je vais me changer. " Je récupère ma veste et titube avant de tourner le dos à l'assemblée du bar. Je ne peux pas donc voir le soupir de soulagement du propriétaire. J'arrive rapidement auprès de la chanteuse ratée à ma plus grande surprise. Je m'arrête à sa hauteur et l'observe pendant quelques secondes alors qu'elle se tient toujours à terre. " Entre nous, qui fait le plus pitié ? Même un ivrogne tient plus facilement sur ses jambes. " Puis, je tends la main vers elle avant de me rétracter. " Excuse-moi. Une lumière de lucidité. Démerde toi toute seule, l'empotée. Je suis pas ton héros. " Je pousse ensuite la porte et sors avant de réaliser le froid de canard auquel je vais être confronté.

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T'entends les rires derrière toi, et tu serres les dents. Il ne manquait vraiment plus que ça. Un rappel à l'ordre divin peut-être, retour de karma après ton geste inconsidéré et tes paroles cinglantes. Qu'importe. Présentement, t'es juste amère, et t'as qu'une envie c'est de rentrer au dortoir et dormir pour oublier ce fiasco. Quand tu vois l'importun arriver à ton niveau, et que t'entends sa voix agaçante, tu soupires. Il te fatigue vraiment celui-là. Tu fixes sa main d'un air dédaigneux, comme si t'allais la prendre tiens. Heureusement pour son amour-propre, il la retire avant que tu dises quoi que ce soit. Il est sérieux? L'alcool lui donne des ailes ou alors ses neurones sont si noyés qu'il se sent plus? Tu ris toute seule, incapable de lui répondre. Pour quoi faire de toute façon? Il veut le dernier mot, qu'il le prenne, c'est bien tout ce qu'il lui reste à ce stade. Tu te relèves avec peine, ramassant tes affaires, remerciant silencieusement le ciel en voyant que rien n'est abîmé. En fait, la seule victime, c'est ce traître de talon. Génial. Tu vas faire comment pour rentrer? Pas question de boiter sur tout le chemin, tout ce que tu peux gagner à faire ça, c'est de te casser la figure une fois de plus. Le problème, c'est que dehors ça gèle comme il n'est pas permis. Tes pieds vont souffrir, tu le sais déjà, mais pour le coup, t'as pas trop le choix. Tu le sauras pour la prochaine fois : toujours prévoir une autre paire de chaussures. Tu enlèves tes bottines avec réticence et les mets dans ton sac. Maintenant t'as plus que tes chaussettes pour te protéger du bitume et du froid. Au moins tu vas pas traîner comme ça. Tu sors enfin, jettes à peine un regard sur la cause de tes tourments, l'ignorant royalement alors que tu le dépasses de ta marche rapide, et ce, malgré tes petites jambes. Ça gèle vraiment, si tu gardes tout tes orteils après ça, c'est un miracle. Tu rêves déjà d'une bonne douche chaude, et t'as encore plus hâte de rentrer et de mettre un point final cette soirée atroce.

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La sortie du bar connaît un fort embouteillage en la présence de l'artiste ratée. Si cette demoiselle a dû réussir son début de show comme une véritable diva, sa sortie est par contre plus pathétique. Décidément, je n'aurais pas être à sa place. Je me sens clairement mieux dans mes bottes, y compris lorsque je décide de ne pas aider la jeune femme. Je ne voudrais pas qu'elle crache sur mes précieuses mains. Du coup, je me contente de la regarder d'un air hautain alors que je finis par tracer ma route. Pour son plus grand malheur, je reste devant le commerce pour relever la fermeture éclair de mon manteau. Pendant plusieurs secondes, le froid manque de me transformer en bonhomme de neige. Pourtant, l'alcool continue de couler dans mes veines et les réchauffe naturellement. Je ne fais tout de même pas l'erreur de ne pas m'habiller correctement. Je ne voudrais pas choper la crève ou une bonne grippe. Je refuse de rester coincé dans mon lit pendant plusieurs jours, je mérite de sortir autant que je veux. Arquant un sourcil, je sens la présence de la demoiselle derrière moi. Celle-ci m'ignore complètement et je ne peux pas m'empêcher de sourire, surtout quand je la vois porter ses chaussures à la main. Vraiment ? Je chuchote. " Pourquoi elle ne prend pas un taxi, cette pouilleuse. " Je secoue la tête et glisse ma main dans les poches chaudes de mon manteau avant de prendre la même direction qu'elle. Je dois rentrer au dortoir, je n'ai pas l'intention de la suivre. En tout cas, elle doit vraiment se geler à marcher ainsi mais vu notre altercation et mon état, ce n'est pas forcément une bonne idée. Et puis, je ne suis pas un héros, juste un plouc qui rêve désormais de son lit. J'échappe un rire. " Elle est vraiment tordue, cette fille. "