Les cheveux collés au front, Nayoung se réveilla de son cauchemar avec un cri silencieux. Même après un mauvais rêve, elle n’arrivait pas à sortir de son de sa gorge. Tout resté à l’intérieur d’elle, sans qu’elle ne puisse faire quoique ce soit. C’était frustrant et en même temps une bonne chose. Elle ne voulait pas réveiller ses colocataires. Elle ne voulait pas être un poids pour les autres. Elle s’assit dans son lit, le dos contre le mur et fit quelques exercices de respiration silencieusement. La jeune femme avait lu ça sur internet, ça aidait à la calmer. Ça ne fonctionnait pas à chaque fois, mais elle essayait et c’était le principal. Seulement, cette fois-ci, ce ne fut pas le cas. Elle sentit les larmes sur son visage avant même de se rendre compte qu’elle pleurait. Son rêve avait été plus violent que d’habitude, plus vivide aussi. Elle s’était souvenue de tout ce qui s’était passée et l’avait revécu. Le vivre une fois était horrible mais le revivre encore et encore était pire que tout. Même un an et demi après, elle n’arrivait pas à se défaire de l’emprise que cette expérience avait sur elle. Nayoung se rendait compte qu’elle était peut-être revenue à l’école et dans la vie sociale un peu trop vite. Seulement, elle ne pouvait pas rester encore chez elle à ne rien faire. Ce n’était pas bien.

Soufflant une grande bouffée d’air, elle se leva pour ouvrir son armoire. Rien de ce qu’elle ne ferait ne pourrait l’aider à aller mieux. Elle devait donc avoir recours à la dernière solution qu’elle possédait : sa veste. La veste de cet inconnu qui l’avait sauvé l’aidait toujours dans ce genre de cas. Elle se sentait en sécurité avec malgré le fait qu’il n’y avait plus son odeur dessus. Elle l’avait lavé depuis, de nombreuses fois, mais ce vêtement avait vu plus de crise d’angoisse et de larmes que n’importe lequel de ses proches. Et cette nuit, encore une fois, ce serait le cas. Elle la passa en silence. Elle était bien trop grande pour son petit corps et lui faisait presque une jupe, mais elle se sentait bien avec. Nayoung se replaça dans son lit, le nez dans le tissu et respira plusieurs fois dedans, jouant avec les manches pour couvrir l’intégralité de ses mains avant de réussir à s’endormir. Elle ne fit plus de cauchemar et put finir sa nuit tranquillement.

Le lendemain, elle se réveilla avec des poches sous les yeux et les cacha comme elle put avec du maquillage. Elle se prépara pour sa journée de cours, toujours en silence et au dernier moment, enfila la veste. Nayoung faisait souvent ça après une crise ou une nuit de cauchemar pour se donner du courage pour la journée qui arrivait. Elle attrapa ses affaires et un livre et quitta le dortoir des pyobeom sans dire quoique ce soit à qui que ce soit. Elle se dirigea tout d’abord vers la bibliothèque pour rendre le livre qu’elle devait rendre aujourd’hui. Elle rasa les murs, essayant de se faire la plus discrète possible. Ce n’était pas difficile au vu de son petit mètre quarante-huit. Tout allait dans le meilleur des mondes jusqu’à ce qu’elle rentre dans quelqu’un. Elle ne leva pas les yeux mais elle reconnu la carrure d’un homme. Aussitôt, elle se mit à trembler et ses yeux s’humidifièrent. Elle releva le regard vers la personne, simplement pour mieux le détourner et chercher autour d’elle, le meilleur endroit pour le fuir et fuir les gens autour d’elle.

Ce n’était vraiment pas de chance. Nayoung avait toujours pensé que rester loin du milieu des couloirs feraient en sorte qu’elle ne prendrait personne de plein fouet. C’était pour cette raison qu’elle passait la plupart de son temps à raser les murs, parce qu’elle n’avait pas peur de rentrer dans quelqu’un. Seulement, là, ce fut ce qui se passa. La jeune femme rencontra le corps d’un homme. Aussitôt, le sien réagit. Elle sentit tous ses membres se tendre et trembler tandis que ses yeux se remplirent de larmes. Les vestiges de son cauchemar de la nuit remontèrent et les essaya de calmer la crise d’angoisse qui menaçait d’arriver. La fatigue n’aida pas la jeune femme à se calmer. Elle sentait tout lui revenir en pleine gueule. Elle aurait aimé être assez forte pour passer au dessus de ça. Mais ce n’était pas le cas. Nayoung avait encore des cauchemars qui la réveillait en pleine nuit et donc elle n’arrivait pas à se sortir.

Elle chercha une sortie, ne regardant pas le plus grand en face d’elle. La jeune pyobeom avait l’impression d’être en face d’un géant. Elle et son petit mètre quarante-huit ne faisait pas le poids face à son potentiel mètre quatre-vingts. Elle ne chercha de toute façon pas à savoir sa taille parce que tout ce qui lui importait c’était de s’enfuir de là. Parce que Nayoung savait que la plupart des gens, quand ils rentraient dans quelqu’un, essayaient de toucher la personne pour savoir si elle allait bien. Elle, il ne fallait surtout pas faire ça, sinon, elle lâcherait un cri et se recroquevillerait en boule. Cependant, l’inconnu eut un geste qui surprit la fille Gong. Il s’excusa et se recula. Cela stoppa net la crise de panique qui menaçait d’arriver sous la surprise. Sa respiration se bloqua dans sa gorge et elle arriva à reculer elle aussi d’un pas, secouant la tête pour qu’il ne s’excuse pas.

Nayoung baissa la tête et commença à respirer légèrement plus sereinement. Elle ne savait pas gérer ses crises, mais de temps en temps, elle arrivait à les étouffer dans l’œuf pour qu’on ne les voit pas à l’extérieur. Cependant, à l’intérieur, c’était une tempête de sentiments qu’elle ne pouvait pour le moment pas gérer. Elle finit par s’asseoir par terre, les genoux dans la veste trop grande du jeune homme qui l’avait bousculé. Seulement, elle ne se souvenait pas que c’était lui. Elle se sentait en sécurité dans cette veste et aimait la matière. Il n’y avait plus son odeur, mais elle lui donnait quand même du courage. Elle respirait vite et si d’apparence elle semblait bien, à part un léger tremblement, ce n’était pas le cas à l’intérieur. Elle voulait être partout ailleurs sauf ici.

Avant son agression, Nayoung avait eu la chance de ne jamais avoir fait de crise d’angoisse. Tout n’allait pas spécialement comme elle le voulait dans sa vie, mais elle n’avait jamais eu ce sentiment d’étouffer de l’intérieur et de ne rien pouvoir dire ou faire. Elle ne voulait pas être un poids pour les autres et au début, elle l’était. Elle ne savait pas gérer ce nouvel élément dans sa vie et se mettait à pleurer toutes les larmes de son corps en cherchant sa respiration pour aller mieux. Seulement, ça ne fonctionnait pas à chaque fois et elle avait souvent l’impression d’embêter ses parents avec ses crises. Alors très vite, la jeune femme avait réussi à ne plus les rendre visible. Dans ces cas, elle se mettait dans un coin et attendait que ça passe. Souvent elle s’enfuyait de la scène pour éviter les questionnements et les aides extérieures qui ne sauraient l’apaiser. Mais aujourd’hui, alors qu’elle rentre dans un inconnu, elle n’y arrive pas. Ses jambes sont molles et elle a du mal à rester debout. Nayoung s’assit donc, la tête dans ses bras, cachée par la capuche de cette veste bien trop grande pour elle. La pyo essaya de respirer plus calmement en vain. A l’intérieur d’elle, c’était comme une tempête où son bateau dont elle n’avait plus les commandes dérivait loin, beaucoup trop loin.

Elle distingua un mouvement près d’elle mais ne risqua pas un coup d’œil dans la direction où elle l’avait entendu. Elle savait qu’il était là, qu’il était resté et elle le remercia silencieusement de ne pas s’être approché d’elle et de ne pas lui avoir parlé ou touché. Là, elle aurait pu mal réagir et ce n’était clairement pas ce qu’elle voulait. Nayoung se recroquevilla un peu plus sur elle et tenta de faire abstraction des bruits autour. Les gens commençaient à partir, les laissant tous les deux au sol, ne voulant sûrement pas interagir avec des gamins qui ne savaient pas ce qu’ils foutaient là. elle aurait aimé être ailleurs qu’ici, ne jamais être sortie de sa chambre au dortoir des pyo ou même n’être jamais revenue en cours. Néanmoins, elle était là et elle n’arrivait pas à se calmer.

Le jeune homme à ses côtés commença à respirer de façon plus audible et à compter. Elle l’écouta et inconsciemment, elle calqua son rythme cardiaque ainsi que ses inspirations et expirations sur le rythme qu’il imposait. Sans s’en rendre compte, Nayoung trouva le son de sa voix apaisant et même si elle n’arriva pas complètement à effacer cette crise qu’elle n’avait pas laissé exploser à la vue de tous, elle commençait à la maitriser un peu. Elle osa lever la tête vers lui, ne découvrant qu’une partie de son visage, pour plonger son regard dans le sien. Il la regardait et la jeune femme sentit ses joues prendre une couleur rouge. Elle remercia la veste et son avant-bras de la cacher aux yeux du jeune homme. La jeune femme détourna le regard et attrapa son calepin. Elle y inscrivit quelques mots dessus et lui tendit, faisant attention à ce qu’il puisse le prendre sans qu’ils ne se touchent. Sur la feuille, elle avait écrit : « Merci. Ça m’a aidé… T’as l’habitude ? » Elle faisait bien entendu référence à sa respiration et au comptage qu’il avait effectué à voix haute.

@ji hye seong