Tenue. || Il suffit d'être habillée comme une femme pour que le serveur vous emmerde dès la première occasion. Putain de serveur, je porte une jupe tous les six mois, alors qu'on me le fasse pas regretter...
Bon, je l'avoue, je suis de mauvais poil. Qui ne le serait pas ? Mon père et Tae Young ont fait un deal sans me demander mon avis. Résultat : j'ai tourné le dos au premier, et le deuxième m'a tourné le dos à moi. Si c'est pas beau... alors pourquoi ils me manquent après tout le mal qu'il m'ont fait ? Heureusement que j'ai encore une once de fierté et que j'appelle aucun des deux, pour l'instant. Je laisse tomber ma tête légèrement en arrière, oh Makoto où es-tu ? J'ai besoin de lui pour me changer les idées. Il a toujours été ma pilule de bonne humeur : involontairement très drôle, à l'écoute, passionné... c'est exactement le genre de personne que j'aime fréquenter. Et, comme d'habitude et malgré ma situation, je n'ai pas tardé à l'appeler dès mon retour à Séoul.

Il devrait quand même remarquer que d'habitude, je mets moins longtemps à revenir. Mais cette fois, je me suis occupée comme je pouvais au travail, renonçant aux petits congés pour pouvoir oublier mes soucis sentimentaux. Quand il montre enfin le bout de son nez, je me lève pour le saluer. « Ouah, t'as pas trop vieilli de ce que je vois. Je pensais qu'en te revoyant, tes muscles se seraient transformés en graisse. » dis-je, clairement consciente de ma longue absence et taquine. Je me retiens de faire une vanne du genre "je t'aurais pas reconnu sans les bandages", contente qu'il ne soit pas blessé. Je m'assois ensuite, souriante, faisant comme si de rien n'était.

« Comment ça va ? » je demande, quand soudain mon regard se pose sur l'écran de mon téléphone dont la sonnerie se fait entendre. Mon père encore, mais j'ai toujours pas envie de lui parler. Mon sourire disparaît et quand le serveur vient, je lui demande d'un ton agacé de nous servir quelques bouteilles de saké. Oui, j'ai besoin de noyer ma colère dans la boisson. Et j'ai pas très faim pour l'instant.

« Je m'en vais ! » « Vous allez où ? » « Bah, je m'en vais ! » « Et vos cours ? » « Ah nan ! Je vous avais dit de les annuler. » Il gonfle les joues et la regarde en la foudroyant presque du regard avant de la voir rire. « Je sais, je vous taquine, bonne après-midi. » A la fois soulagé et aussi bougon, il hausse ses épaules et secoue la tête en attrapant sa sacoche qu'il se traîne depuis au moins dix ans. Elle est vieille, elle n'a plus vraiment de couleur, elle a été déchiré et raccommodée on ne sait combien de fois, mais il refuse d'en changer, malgré les nombreux achats de ses amis. C'est sentimental. C'était un véritable coup de foudre entre lui-même et elle-même alors voilà. C'est comme ça. De toute façon, malgré la masse d'argent qu'il peut accumuler, il est si peu dépensier qu'il doit ressembler à un clochard. Un peu comme aujourd'hui avec ses baskets presque trouées, son jeans écorché et son t-shirt blanc bien trop large pour lui. On dirait qu'il l'a piqué à Kouji. Souriant en pensant à son meilleur ami, il trottine jusqu'à retrouver la belle coréenne. Il la salut plusieurs fois une fois en face d'elle et se met assis rapidement. « Ouah, t'as pas trop vieilli de ce que je vois. Je pensais qu'en te revoyant, tes muscles se seraient transformés en graisse. »  « Hééééé ! Tu pars longtemps et c'est tout ce que tu trouves de gentil à me dire en revenant ? » Il boude à moitié, la regardant alors qu'elle se content de sourire dans sa taquinerie. « Comment ça va ? » « Oh bah je... » Mais le téléphone sonne, le coupant dans son élan pseudo-artistique de réponse magique. Penchant la tête sur le côté, il papillonne des yeux. « Oro ? » avant de la regarder elle, se demandant pourquoi elle ne répond pas. Il attrape alors le téléphone pour voir que c'est son père et le repose. Oui, Maki et la curiosité, une autre grande histoire d'amour. « Saké ? » Le serveur répète pour être sûr d'avoir bien entendu la jeune femme. « HA-I !! » dit-il alors pour soutenir les dires de son amie. Il a toujours eu une façon bien particulière de dire son « oui » en japonais. Très appuyé, très marqué, et la plupart du temps, dans un grand sourire. « Donc je disais... » Mais le téléphone sonne encore et là, il décroche, sans aucune once de gêne. « On est occupés, merci de rappeler plus tard. » Avant de lui rendre et la regarder. « Donc je disais que moi ça va très bien, mais toi, ça semble pas aller bien. » Il croise ses bras sur la table et plisse les yeux, avançant son buste pour la regarder fixement, comme s'il voulait sonder son âme. « Une histoire de coeur ? Raconte tout à Maki ! OH TU SAIS QUOI ? On peut faire du saut à l'élastique depuis une grue spéciale, ça a été mis pour l'été, tu veux qu'on y aille après pour te changer les idées ? »

Tenue. || Sa réaction me fait pencher ma tête sur le côté en souriant, j'ai passé l'âge pour lui tirer la langue mais mon visage trahit tout mon amusement. Ensuite, je suis bien trop perdue dans mon monde - loin d'être joyeux - pour remarquer à quel point c'est bizarre de laisser le téléphone sonner. J'essaie de reporter mon attention sur Makoto mais, dérangé, il jette un œil sur l'émetteur de l'appel avant de décrocher. « On est occupés, merci de rappeler plus tard. » J'ouvre grand les yeux, récupérant le portable. En temps normal, j'aurais râlé, mais il a bien fait. Il m'arrache un sourire. Je pose mon coude sur la table, le menton dans la paume de ma main. « Tu sais que tu viens de raccrocher au nez du commandant des forces spéciales ? » Quelqu'un d'autre serait probablement déjà en train de s'excuser, mais je sais que lui n'en a rien à foutre.

Je me retiens d'ajouter qu'il ne faut pas compter sur moi pour l'aider s'il finit en taule, pas trop d'humeur de plaisanter. Ce qui ne lui échappe pas, d'ailleurs. Je porte le verre d'eau à mes lèvres, comme si je voulais fuir la question. « Une histoire de coeur ? Raconte tout à Maki ! OH TU SAIS QUOI ? On peut faire du saut à l'élastique depuis une grue spéciale, ça a été mis pour l'été, tu veux qu'on y aille après pour te changer les idées ? » Manquant de m'étouffer avec l'eau, je repose le verre sur la tale puis relève les yeux vers mon ami. Quelque chose a définitivement disjoncté dans son cerveau. Mais à quoi je me suis attendue ? C'est Makoto après tout.

La réflexion me fait rire, et à mon tour je croise les bras sur la table. « T'as vu juste, je me suis fait larguer, mon père est la source du problème et je sais pas quoi faire. Mais j'ai pas encore envie de me suicider. Tu peux pas juste me faire un câlin et me dire que tout ira bien ? » Je m'adosse à ma chaise, amusée, mais la profonde tristesse qui refuse de me quitter m'oblige à re-sombrer dans mes pensées. Ouai, bon, peut-être qu'il vient de proposer la bonne technique pour me changer des idées. « Bon, d'accord... mais s'il m'arrive quelque chose t'auras mon avocat sur le dos. » plaisante-je, espérant ne pas regretter.

« Tu sais que tu viens de raccrocher au nez du commandant des forces spéciales ? » Il regarde le téléphone, un peu surpris. « Oro ? » Avant d'avoir un petit rire qui lui échappe et de finalement, hausser les épaules avec sa gueule d'homme-enfant pas vraiment concerné par ce qui vient d'arriver. « J'ai été poli. » Oui, c'est un fait. « Et tu m'aimes trop pour me laisser enfermer. » Il lui offre un grand sourire avant de boire un petit peu lorsque le saké arrive devant eux et qu'ils se sont servis. Bien sûr, il n'oublie pas de trinquer et avale le liquide rapidement, accoutumé au possible à en boire. Il sert rapidement deux autres verres avant de poser la bouteille et la fixer, beuglant alors l'idée du siècle - selon lui – à la face de la jolie militaire. Parce qu'il voit qu'elle n'est pas bien et Maki n'a jamais été un chef pour remonter le moral du monde avec des mots. Déjà avec Sora, son ex, c'était en agissant qu'il la faisait à nouveau rire et sourire. Sora… Il se mordille la lèvre en pensant à elle avant de soupirer un peu, puis de sourire à nouveau, avalant le second verre avec encore plus de rapidité que le premier. Le chemin est déjà tout tracé, alors ça descend tout seul. Sale japonais alcoolique va. « T'as vu juste, je me suis fait larguer, mon père est la source du problème et je sais pas quoi faire. Mais j'ai pas encore envie de me suicider. Tu peux pas juste me faire un câlin et me dire que tout ira bien ? » « Oro ? » Il papillonne des yeux en la fixant intensément avant de se lever d'un bon. « HA—I ! » et de venir dans son dos pour l'enlacer en la berçant – un peu violemment, juste un peu – et de sourire. « Tout ira bien si tu veux que ça aille bien ! » Parce que pour lui, les choses ne sont qu'une question de volonté. Soit on en a, soit on en manque. Il se redresse, pose ses mains sur les épaules de la jeune femme et sourit. « Bon, d'accord... mais s'il m'arrive quelque chose t'auras mon avocat sur le dos. » Un autre rire lui échappe et il secoue la tête. « Pourquoi partir du principe que ça va mal se passer hein ? » Eternel optimiste, il voit toujours le bon côté des choses avant d'envisager que ça ne peut pas aller. « J'ai fait des dizaines de sauts ! C'est juste totalement grisant ! » Il reste debout et vide le troisième verre avant de lui tendre la main. « Allez viens. » Il attrape sa main lorsqu'elle se lève et il paye le serveur, quand même, y pensant avant de franchir le seuil de l'endroit sous l'impulsivité dont il fait preuve chaque jour. Avec l'alcool ingéré, il hèle un taxi… Il beugle même plutôt, faisant son petit nippon colérique, mais au moins, ça marche. Rapidement, la voiture les emmène à l'endroit voulu, et lorsqu'il sort du véhicule, il regarde quelqu'un sauter, souriant de plus belle en sautillant sur place. Il paye les places par réflexe et commence à monter toutes les marches avec elle. « Il a fait quoi ton père pour que ça se finisse avec ton copain ? » C'est difficile les ruptures. Il en sait quelque chose, au fond, il ne sait jamais vraiment remis de la sienne. Sora continue de lui manquer, mais c'est difficile de dire : pardonne-moi et je te pardonne à quelqu'un.

Tenue. || « J'ai été poli. Et tu m'aimes trop pour me laisser enfermer. » Mon amour pour certains me perdra un jour, pense-je en l'écoutant. C'est vrai que mon père posera mille et une questions à propos du jeune homme que, lui, jugera impoli, mais vu qu'on s'entend pas à merveille en ce moment, il s'abstiendra sûrement de chercher la petite  bête. On a assez de problème à résoudre comme ça. Je réponds par un hochement de tête, alors, admettant que je "l'aime trop", et amusée. Je le suis également par son câlin, que je n'avais proposé que pour plaisanter, mais plus que tout, je dois avouer que je suis touchée. Je ne suis pas très tactile, mais ce simple contact me fait fermer les yeux légèrement, et serrer ses mains tout en me répétant que tout ira bien. Aussi cheesy que cela puisse paraître, j'en avais tellement besoin.

Je suis pas moins rapide à vider mes verres, ayant bien trop de choses sur le cœur. Et le peu d'alcool que j'ai maintenant dans le sang suffit pour que j'accepte de faire du saut à l'élastique. Quelle idée, mais quelle idée. « Pour toi, le verre n'est jamais à moitié vide, hein ? » je demande, surprise par tant d'optimisme. « J'ai fait des dizaines de sauts ! C'est juste totalement grisant ! » J'hausse un sourcil, je me suis attendue à ce qu'il me rassure par rapport à ce fameux saut, mais... « Et t'as pas fini autant de fois à l'hôpital, j'espère ? » A peine ai-je le temps de me lever, qu'il me prend déjà par la main et je me retrouve rapidement dans un taxi puis à destination. L'inconnu qui vient de sauter devant mes yeux me fait grimacer alors que ça produit l'effet inverse chez Makoto. Mais lui vient d'une autre planète.

Je le laisse payer nos places avant de monter les marches, sentant que ça se concrétise. Non mais quelle mouche m'a piquée... « Il a fait quoi ton père pour que ça se finisse avec ton copain ? » Hein, quoi ? Je me tourne vers lui, incrédule. Il a vraiment réussi à me faire oublier mes soucis pendant deux minutes entières. « Eh bien il pense que mon copain est indigne de moi, que je devrais choisir quelqu'un de parfait, qui lui plaise à lui pour faire court. Vu sa position, il a surement fait pression pour que mon copain... ex copain, me quitte et ça a marché. » le long cri d'un inconnu me fait presque frissonner, oulala, dans quoi je viens de me lancer. La dernière marche franchie, je jette avant tout un regard vers le bas, prudente. « J'aurais dû me contenter du câlin...  »

« Et t'as pas fini autant de fois à l'hôpital, j'espère ? » Il évite volontairement de répondre à ça pour ne pas avoir à lui avouer que bah… Le deuxième ou troisième saut, l'élastique avait pété à cause d'un mauvais entretien et qu'il avait atterrit violemment dans le lac juste en dessous… D'un côté, c'était un soulagement de savoir qu'il y avait de l'eau juste après et pas du béton, de l'autre, c'est quand même violent comme atterrissage et il avait fini avec un bras et deux côtés brisés. Mais bon, c'est pas si graaaave. Il avait gagné son procès au moins, contre les abrutis qui avaient fait le truc et maintenant, il vérifie lui-même le matériel et les attaches et s'il ne le sent pas, il ne saute pas. Il espère juste que ça ira à vrai dire avec elle. Lorsqu'ils arrivent enfin à la tour, il se sent excité comme un gamin qui va ouvrir ses paquets de Noël. « Eh bien il pense que mon copain est indigne de moi, que je devrais choisir quelqu'un de parfait, qui lui plaise à lui pour faire court. Vu sa position, il a surement fait pression pour que mon copain... ex copain, me quitte et ça a marché. » « Noni ? » Sérieusement ? Il hausse ses sourcils en s'arrêtant au milieu des marches pour la regarder longuement. « C'est... » Il fronce ses sourcils. Il repense à ses parents qui n'avait pas forcément appréciés Sora au début, parce qu'elle est coréenne, mais he, il s'en est totalement contre-foutu. Mais là… jusqu'à menacer le boulot ? C'est… Il grogne et monte les marches un peu plus vite du coup. « J'aurais dû me contenter du câlin...  » « Hé ? » Il la regarde alors qu'un mec vient de sauter et hurler sa vie en même temps. Il lui prend alors la main pour la tirer en avant. « ça va aller, j'vais demander si on peut pas sauter ensemble ! » Il lui sourit pour la rassurer et après une longue montée, ils arrivent enfin au bon endroit. Avançant, il va voir un des moniteurs et parlemente avec lui avant de hocher la tête. « On peut sauter ensemble. » Il observe alors les gens devant eux, dont un qui s'accroche à une poutre en pleurant. Lalalalala…. Faut du courage bon sang ! Il se tourne alors vers Hye mi. « T'as jamais fait de saut en parachute à l'armée ? » ça aussi, c'est un de ses grands kifs. En fait, il se demande parfois ce qu'il n'a pas essayé niveau sport…. Lorsque c'est leur tour, il enfile les harnais avec elle, se collant bien au dos de la belle pour les maintenir, faisant les gestes avec les moniteurs, même presque mieux que eux. « Oui, je sais comment ça marche. » Dit-il alors sur un ton excédé. Screugneugneu… Boudant un peu, il vérifie encore que c'est bon avant de se mettre au bord du précipice, dos dans le vide pour qu'elle ne regarde pas le fond. « Prête ? » Il n'attend pas vraiment qu'elle lui dise oui, non ou merde…. Et il se laisse alors tomber, un bras la tenant pour la rassurer, l'autre dans la vide alors qu'il n'est qu'une boule de joie absolument heureuse…. «YAAAAAAAAAAAAAAAAAAATTTAAAAAAAAAAAA! » Son cri de nippon joyeux résonne dans tout le lieu alors que l'élastique les faits rebondir, puis se secouer pour finalement, les déposer sur un filet géant. Encore attaché à elle, il rit, un immense sourire aux lèvres. « Tu veux recommencer ? »