Les hautes lumières. ☽ Jaysyr.
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Les hautes lumières. ☽ Jaysyr. | Sam 3 Sep - 17:48 Citer EditerSupprimer
les hautes lumières
JAYDEN & TASYR
J'avais les cheveux plus longs, à l'époque. Si longs qu'elle passait souvent ses doigts dedans pour les tirer vers l'arrière et dégager mes yeux, coinçant les mèches résistantes sous la barrette féminine d'une tante. J'en avais horreur ; horreur de leurs rires plus que du reste. J'avais horreur d'elle, dans ces moments-là ; horreur d'elle et de son rire-mélodie clair, parce qu'on ne pouvait pas lui en vouloir, et qu'elle me forçait malgré-moi à rire aussi. Quand on y pense, il y a tellement de choses que je déteste (pire encore : que je débecte, que je répugne, ou qui m'exècrent, au choix). Bien plus que les choses que je pourrais nommer par amour ou appréciation. Je n'aime pas la pluie, non plus. Un jour, j'ai naïvement demandé à ma mère pourquoi il pleuvait toujours, dans les films, lorsque le héros était triste. Elle m'avait répondu que le ciel, compatissant, pleurait avec lui. Pourtant, mon ciel à moi n'a jamais pleuré quand elle est partie, il faisait si chaud que c'en était étouffant, qu'on aurait pu penser que la brèche ouverte avec l'autre monde avait fait remonter les enfers jusqu'à nous. Il n'a pas plu non plus, quand il est parti. Je déteste la pluie, son odeur sur le bitume, et ces gens qui dansent, béat, comme si elle était attendue. Je déteste l'idée qu'elle soit la source même de notre vie, alors qu'elle est incapable de verser de larmes pour le départ de ses enfants et ceux qui en souffrent. Alors j'ai pleuré. Pas beaucoup, au début ; puis j'ai fini par remplacer la pluie, à endosser son rôle, et j'ai détesté l'odeur de mes larmes sur le bitume. Elle est partie sans laisser de trace, et les souvenirs s'amenuisent d'années en années. J'ai beau promettre et jurer, cracher à la face du sol qu'elle restera éternellement gravée dans ma mémoire, j'ai conscience paradoxalement de déformer ses traits aujourd'hui, et nos moments passés ensemble. Il en sera de même pour lui. Je n'ai pas voulu penser qu'il était parti pour de bon, parce que ce n'est pas le cas, et qu'il n'aura pas la chance de connaître ma mère dans l'au delà (j'aime à penser que tout ceux que j'ai aimés se retrouveront en haut). Il a juste disparu sans laisser de trace, lui non plus, volatilisé. Et j'en viens à me dire, parfois, que mes souvenirs ne sont que de l'imagination pure. Alors il reviendra, il paraît qu'il reviendra, il faut qu'il revienne. Mais c'est un frère d'armes, et je refuse d'avoir la poudre d'obusiers dans les yeux, et je me cache dans mes propres tranchées. Qui serait assez fou pour revenir sur les traces de son champ de batailles, prendre le risque de marcher à nouveau sur les mines ? Il ne reviendra pas. J'l'ai pas cru. J'ai pas voulu l'croire, j'ai fermé les yeux et j'ai prié pour que demain soit normal. J'ai pas voulu l'croire mais j'l'ai entendu, et c'était le pire.
J'ai pas voulu entendre ça, j'aurais aimé être sourd, mais même mes paumes plaquées contre mes oreilles n'ont fait que renforcer les battements incontrôlables de mon cœur en émoi. J'ai eu envie de tout plaquer, de tout virer, et rien que son nom a réveillé en moi la chaleur d'une lame dans le poignet, le besoin viscéral d'oublier mon mal. J'étais pas dans la même pièce, j'ai espéré avoir déformé les propos par la porte, mais je sais au fond de moi que c'est véridique. Il était là, Jayden. Celui avec qui j'ai ri, avec qui j'ai fais des choses connes, bien trop puériles mais avec le sourire (parce que j'ai pu sourire à nouveau, en partie grâce à lui. Comment faire s'il n'est plus là ? Je ne suis même plus certain que mon visage se souvienne de ces automatismes. J'ai tout désappris. Revient, apprend-moi). Il était là, et lui aussi, il a pleuré ; je crois que je l'ai entendu aussi. Il a répété son nom, en boucle. Comme un gong, le glas qui paralyse le sang, bouchonne les veines, donne l'impression à ton corps d'imploser jusqu'à l'explosion. Qu'il se taise. Pourvu qu'il se taise, lui et sa voix ivre que j'ai peiné à reconnaître, et son amour dégoulinant pour le traître, le lâcheur, l'abandonneur. J'ai courbé mon corps vers l'avant, pris de nausée, mais rien n'est sorti. C'est comme si mon corps acceptait déjà qu'il n'ait plus la moindre présence, là quelque part, dans mon palpitant, comme avant. J'ai simplement pleuré, en silence (Daeki n'aime pas qu'on le dérange dans son travail, et je doute que mes pleurs soient gratifiants), relevant de temps à autres ma main pour éponger les larmes et laisser la place à d'autres. Ça fait combien de temps, que j'ai pas pleuré, maman ? Tu sais, j'ai horreur de l'odeur de mes larmes sur le bitume.
Je sais pas, y'a eu un vide. Quelque chose d'inexistant et bien trop lourd à porter, le genre de poids incompréhensible sur ma poitrine qui a manqué de me faire vaciller dans le Styx. J'dois rester fort, pour eux, pour elle, pour la vie que je veux et les enfants qu'on aura. Mais à quoi bon s'il ne revient pas pour constater mes progrès ? Je me sens seul, triste et abandonné, j'avais besoin de lui comme une cigarette pendant le café, à la pause déjeuné ; il s'est taillé. J'ai envie de hurler, de passer mes nerfs sur quelque chose, quelqu'un et ça m'effraie. Ça fait trop longtemps que c'est pas arrivé, je sais plus bien gérer. Alors quand j'ai compris qu'il sortait du sous-sol du kurss, j'ai attrapé son bras, et j'ai oublié que j'étais son président, qu'il était gumiho, qu'on se connaissait. « Il reviendra pas. Tu t'es fait tatouer pour du vent alors qu'il t'a aussi abandonné. Pourquoi tu t'obstines pour un moins que rien ? » Je sais que j'ai les yeux qui brillent, je sens les éclairs et l'orage qui me traversent. Je sais aussi que je pense pas un traître mot de ce que je dis, j'ai les larmes jusqu'aux chevilles et les orbes noyés. Mais j'ai besoin, besoin de pas être seul à être piteux ce soir.
J'ai pas voulu entendre ça, j'aurais aimé être sourd, mais même mes paumes plaquées contre mes oreilles n'ont fait que renforcer les battements incontrôlables de mon cœur en émoi. J'ai eu envie de tout plaquer, de tout virer, et rien que son nom a réveillé en moi la chaleur d'une lame dans le poignet, le besoin viscéral d'oublier mon mal. J'étais pas dans la même pièce, j'ai espéré avoir déformé les propos par la porte, mais je sais au fond de moi que c'est véridique. Il était là, Jayden. Celui avec qui j'ai ri, avec qui j'ai fais des choses connes, bien trop puériles mais avec le sourire (parce que j'ai pu sourire à nouveau, en partie grâce à lui. Comment faire s'il n'est plus là ? Je ne suis même plus certain que mon visage se souvienne de ces automatismes. J'ai tout désappris. Revient, apprend-moi). Il était là, et lui aussi, il a pleuré ; je crois que je l'ai entendu aussi. Il a répété son nom, en boucle. Comme un gong, le glas qui paralyse le sang, bouchonne les veines, donne l'impression à ton corps d'imploser jusqu'à l'explosion. Qu'il se taise. Pourvu qu'il se taise, lui et sa voix ivre que j'ai peiné à reconnaître, et son amour dégoulinant pour le traître, le lâcheur, l'abandonneur. J'ai courbé mon corps vers l'avant, pris de nausée, mais rien n'est sorti. C'est comme si mon corps acceptait déjà qu'il n'ait plus la moindre présence, là quelque part, dans mon palpitant, comme avant. J'ai simplement pleuré, en silence (Daeki n'aime pas qu'on le dérange dans son travail, et je doute que mes pleurs soient gratifiants), relevant de temps à autres ma main pour éponger les larmes et laisser la place à d'autres. Ça fait combien de temps, que j'ai pas pleuré, maman ? Tu sais, j'ai horreur de l'odeur de mes larmes sur le bitume.
Je sais pas, y'a eu un vide. Quelque chose d'inexistant et bien trop lourd à porter, le genre de poids incompréhensible sur ma poitrine qui a manqué de me faire vaciller dans le Styx. J'dois rester fort, pour eux, pour elle, pour la vie que je veux et les enfants qu'on aura. Mais à quoi bon s'il ne revient pas pour constater mes progrès ? Je me sens seul, triste et abandonné, j'avais besoin de lui comme une cigarette pendant le café, à la pause déjeuné ; il s'est taillé. J'ai envie de hurler, de passer mes nerfs sur quelque chose, quelqu'un et ça m'effraie. Ça fait trop longtemps que c'est pas arrivé, je sais plus bien gérer. Alors quand j'ai compris qu'il sortait du sous-sol du kurss, j'ai attrapé son bras, et j'ai oublié que j'étais son président, qu'il était gumiho, qu'on se connaissait. « Il reviendra pas. Tu t'es fait tatouer pour du vent alors qu'il t'a aussi abandonné. Pourquoi tu t'obstines pour un moins que rien ? » Je sais que j'ai les yeux qui brillent, je sens les éclairs et l'orage qui me traversent. Je sais aussi que je pense pas un traître mot de ce que je dis, j'ai les larmes jusqu'aux chevilles et les orbes noyés. Mais j'ai besoin, besoin de pas être seul à être piteux ce soir.
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Re: Les hautes lumières. ☽ Jaysyr. | Sam 3 Sep - 17:52 Citer EditerSupprimer
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JAYDEN & TASYR
Il voulait pas, Jay, il voulait pas revenir ici. Il voulait pas revenir en Corée, il voulait rester en Australie pour toujours. Elle lui manque sa mère, elle lui manque tout le temps, chaque jour un peu plus – mais y a eux, aussi. Y a leurs sourires-bonheurs, leurs regards-amours. Y a leur présence chaleureuse qui réchauffe son âme. Alors il est rentré, Jay, juste pour eux, juste pour les revoir, ses amis. Pour Sacha et ses larmes tranchantes comme des lames. Pour Fuuko et son rire léger comme l’air. Pour Sati et son toucher-guérison. Et puis pour Kyu, Kyu et son regard destructeur, Kyu et son regard détruit. Parce qu’il pouvait pas supporter d’être loin d’eux, parce qu’il pouvait pas supporter d’être loin de lui, alors il est revenu. Le soleil a retrouvé sa lune ; et la lune s’en est allée. Alors il a pleuré, Jay, il a pleuré parce qu’il comprenait – mais qu’il pouvait pas le supporter. Il a pleuré la perte d’un bout de son âme, d’une partie de son cœur. Il sait qu’il reviendra, Kyu, mais ça les a pas empêchées, les larmes, de dévaler ses joues comme une cascade. Alors quand son ami lui a proposé de sortir, il est sorti. Alors quand son ami lui a proposé de manger, il a mangé. Alors quand son ami lui a proposé de boire, il a bu.
Un verre.
Deux verres.
Trois verres.
Esprit en vrac, membres tremblants, rire qui dévale sa gorge, s’efface dans l’air. Il se lève, titube, vacille, se retient, et puis rigole, rigole, rigole à s’en faire exploser la voix, rigole à en pleurer aussi. Petite larme qui s’échappe du coin de l’œil, s’aventure dans le monde, vient finalement s’écraser dans son col. Pas d’enterrement. C’est sa tristesse qui s’écrase sur le mur de sa bonne humeur, sa tristesse qui s’échoue sur la plage de sa joie, reflue et réattaque. La tristesse qui se laisse pas avoir, qui veut pas disparaître. Alors Jay qui finit par s’y abandonner, un peu, tremper un orteil, et puis le pied entier, jusqu’à s’y fondre totalement, jusqu’à fusionner totalement. Jusqu’à trouver le moyen d’expulser ça. Une plaisanterie, une proposition, et puis le voilà qui traverse la brume, qui traverse la rue. Il arrive au kurss, sait pas comment il a fait. Il s’en fiche. Il pousse la porte, va au sous-sol. Comme dans un rêve, il comprend pas trop c’qui se passe, il se laisse porter par la vague – la vague de sa tristesse, la vague de ses larmes. Et il demande. Il avait déjà demandé, en fait, s’était renseigné – un peu. Et finalement elle commence à entrer dans sa peau, l’encre. Il ouvre la bouche, laisse sortir un râle, râle qui s’élève dans l’air, prend la forme d’un nom, de ce nom, qu’il murmure pour oublier la douleur. Pour oublier que s’inscrit sur sa peau l’amour indélébile qu’il éprouve pour celui qui est parti. Il voit pas le temps passer, il sent juste la souffrance physique, concurrencée par les hurlements de son cœur, par les larmes qui viennent former un ruisseau sous sa tête. Par ces larmes qui menacent de le noyer, de recouvrir sa vie toute entière.
Et quand ça reflue, quand c’est fini, quand il paye et puis grimpe les escaliers de sa démarche tremblante, il se sent pas mieux, Jay. Il pose une main sur son torse, la douleur pulse dans son être. Juste au-dessus du cœur. Il ferme les yeux, titube, et puis s’arrête. Une main autour de son bras, tranchante. Des mots qui claquent, acides. Et son regard à lui qui se braque – furieux, terrifié, anéanti. « Tu mens. » Les mots hésitants, la voix incertaine. « Tu mens tu mens tu mens il m’a pas abandonné, il va revenir, tu mens, arrête de mentir. » Il répète ces mots comme pour le convaincre ; il se répète ces mots comme pour se convaincre. « C’est pas un moins que rien ! C’est… » Les mots qui se figent dans sa gorge, son esprit qui se vide entièrement – et puis plus rien. Juste une voix. Etouffée. « Ma vie. » La sienne, de voix. Et elles reviennent, les larmes, intarissables, véritable raz-de-marée d’émotions. « Il peut pas partir, il peut pas, il peut pas m’abandonner, il a promis, IL A PROMIS. » Et il se ratatine, s’accroupit, la tête entre les genoux. « Il a promis, il a promis, il a promis. » Tu peux pas hein, Kyu, tu peux pas m’abandonner ?
Un verre.
Deux verres.
Trois verres.
Esprit en vrac, membres tremblants, rire qui dévale sa gorge, s’efface dans l’air. Il se lève, titube, vacille, se retient, et puis rigole, rigole, rigole à s’en faire exploser la voix, rigole à en pleurer aussi. Petite larme qui s’échappe du coin de l’œil, s’aventure dans le monde, vient finalement s’écraser dans son col. Pas d’enterrement. C’est sa tristesse qui s’écrase sur le mur de sa bonne humeur, sa tristesse qui s’échoue sur la plage de sa joie, reflue et réattaque. La tristesse qui se laisse pas avoir, qui veut pas disparaître. Alors Jay qui finit par s’y abandonner, un peu, tremper un orteil, et puis le pied entier, jusqu’à s’y fondre totalement, jusqu’à fusionner totalement. Jusqu’à trouver le moyen d’expulser ça. Une plaisanterie, une proposition, et puis le voilà qui traverse la brume, qui traverse la rue. Il arrive au kurss, sait pas comment il a fait. Il s’en fiche. Il pousse la porte, va au sous-sol. Comme dans un rêve, il comprend pas trop c’qui se passe, il se laisse porter par la vague – la vague de sa tristesse, la vague de ses larmes. Et il demande. Il avait déjà demandé, en fait, s’était renseigné – un peu. Et finalement elle commence à entrer dans sa peau, l’encre. Il ouvre la bouche, laisse sortir un râle, râle qui s’élève dans l’air, prend la forme d’un nom, de ce nom, qu’il murmure pour oublier la douleur. Pour oublier que s’inscrit sur sa peau l’amour indélébile qu’il éprouve pour celui qui est parti. Il voit pas le temps passer, il sent juste la souffrance physique, concurrencée par les hurlements de son cœur, par les larmes qui viennent former un ruisseau sous sa tête. Par ces larmes qui menacent de le noyer, de recouvrir sa vie toute entière.
Et quand ça reflue, quand c’est fini, quand il paye et puis grimpe les escaliers de sa démarche tremblante, il se sent pas mieux, Jay. Il pose une main sur son torse, la douleur pulse dans son être. Juste au-dessus du cœur. Il ferme les yeux, titube, et puis s’arrête. Une main autour de son bras, tranchante. Des mots qui claquent, acides. Et son regard à lui qui se braque – furieux, terrifié, anéanti. « Tu mens. » Les mots hésitants, la voix incertaine. « Tu mens tu mens tu mens il m’a pas abandonné, il va revenir, tu mens, arrête de mentir. » Il répète ces mots comme pour le convaincre ; il se répète ces mots comme pour se convaincre. « C’est pas un moins que rien ! C’est… » Les mots qui se figent dans sa gorge, son esprit qui se vide entièrement – et puis plus rien. Juste une voix. Etouffée. « Ma vie. » La sienne, de voix. Et elles reviennent, les larmes, intarissables, véritable raz-de-marée d’émotions. « Il peut pas partir, il peut pas, il peut pas m’abandonner, il a promis, IL A PROMIS. » Et il se ratatine, s’accroupit, la tête entre les genoux. « Il a promis, il a promis, il a promis. » Tu peux pas hein, Kyu, tu peux pas m’abandonner ?
- tattoo sur le torse :$$$$$$:
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Re: Les hautes lumières. ☽ Jaysyr. | Sam 3 Sep - 17:55 Citer EditerSupprimer
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JAYDEN & TASYR
J’ai pas pu empêcher mes lèvres de s’étirer, comme si elles échappaient à mon contrôle (mais je ne peux m’empêcher, non plus, de songer que bien des choses échappent à mon contrôle, ces jours-ci). Je les ai senties percer ma peau, étirer mes chairs, mettre à vif mes tissus en un sourire de l’ange douloureux, et j’ai réprimé au fond de ma poitrine le sanglot désespéré. J’ai pas voulu être comme ça, pas devant Jayden alors que j’ai de la considération pour lui, pas devant un gumiho alors que je me tue à redresser mon image présidentielle, pas devant un être humain alors que je me suis promis de ne plus être pour eux le poison d’une rose épineuse, la morsure de la vipère. Mais qu’on me pardonne, et on me pardonnera (car les hommes sont des loups pour eux-mêmes, des monstres de cruauté, et qu’ils jettent paradoxalement leur pardon par les fenêtres aux miséreux, secoués par le remord de la pitié sans nul doute). Je pèche parce que j’ai mal, parce qu’Hadès dessine une porte vers le gouffre de son doigt anguleux contre ma poitrine, et qu’Hermès s’empresse d’y noyer ses missives nauséeuses. J’ai mal parce qu’il est parti, et parce que je sais qu’il ne reviendra pas. J’ai en horreur l’idée d’être le seul à souffrir, et si je dois sombrer, cet homme est le candidat parfait pour m’épauler dans ma descente : un de ses proches, lui aussi doit comprendre qu’il va souffrir maintenant. Et cette idée me révulse autant qu’elle attise sur ma peau les frissons de l’excitation. Il a fait de moi un homme de meilleur. Son départ me replonge dans les vices que je ne sais contrôler et que je révère, ces peurs infernales qui me plaisent, ces pulsions dangereuses et libératrices. Suis-je une forme de croque-mitaine ? J’ai toujours eu peur de ce que j’étais, de ce que la vie a décidé de faire de moi, puis j’ai naïvement pensé que l’important n’était pas ce que l’on était, mais ce que l’on avait choisi d’être. En vérité, le choix ne nous appartient pas, et tôt ou tard, notre nature nous rappelle à elle. J’pense pas mériter de vivre, encore moins dans un monde où il n’est pas, mais j’pense pas non plus être assez courageux pour tout abandonner jusqu’à mon souffle.
Ça se voit dans son regard, il commence à saisir lui aussi. Ça agrandit mon sourire, et putain que j’ai mal d’être aussi odieux. J’veux juste retrouver sa saveur, son odeur, me blottir dans ses bras une dernière fois avant de retrouver ceux de Lei et nos draps qui sentent trop bon pour un mec comme moi ; mais au lieu de ça, j’ai besoin de l’écraser sous ma chaussure pour qu’il compatisse et ressente les mêmes choses que moi, qu’on puisse pleurer à deux. « Il ne t’a pas abandonné Jayden. » Je souffle, j’expulse l’air par mon nez si violemment que j’en viens à m’interroger sur la quantité que les poumons peuvent stocker. Questions inutiles pour balayer, retarder l’instant. Et là encore, j’ai au fond du cœur quelque chose de poignant qui s’enfonce et me déchire les artères un à un. Lui a-t-il seulement déjà parlé de moi ? « Il nous a abandonné. T’es pas le seul dans cette merde. C’était ma vie à moi aussi. Il m’a promis des choses, il m’a promis la lune, il m’a fait jurer que tout irait bien. Que je remonterai la pente, et qu’il me suivra de près. On a fait nos conneries ensemble, et j’ai fais les miennes de mon côté aussi, je suis comme toi… » Ma voix est posée, elle m’échappe comme un texte, un récital presque biblique, de mes lèvres pourtant tremblantes. Mais la vérité, c’est que j’ai déjà les orbes noyés dans l’océan de mes doutes, et que les digues prêtes à céder menacent d’écouler les rivières sur les plaines de mes joues. Je viens soulever mon haut, dévoiler sur mes côtes le tatouage de lunes, les caresser du bout d’un doigt. « Moi aussi, j’ai fais comme toi. J’l’ai dans la peau. C’était un guerrier, Kyu, un battant, il a jamais rien lâché. Mais c’était pas quelqu’un fait pour mener la guerre toute sa vie, il a choisi de partir quand tout allait un peu mieux. » Je ravale difficilement mes larmes, et mes hoquets de cœur brisé. J’en viens à l’envier, lui et ses yeux aux reflets d’ivresse, et ces promesses qui dansent dans ses prunelles comme s’il oubliera tout le mal demain. « Après tout, qui reviendrait là où il a tant souffert ? Tu penses vraiment qu’il va revenir, t’es aussi naïf ? » Et je l’envie encore, sur ça. J’aimerai espérer aussi, tellement. Mon sourire de l’ange a disparu, j’ai la mâchoire crispée et le cou douloureux à force de déglutir, mais les barrages ont cédé et je ne sais pas quel piteux spectacle je suis en train d’offrir (pensée qui me tire un rire). Je dois avoir l’air d’un fou. Comme je l’étais avant ; je le redeviens juste par son absence.
Ça se voit dans son regard, il commence à saisir lui aussi. Ça agrandit mon sourire, et putain que j’ai mal d’être aussi odieux. J’veux juste retrouver sa saveur, son odeur, me blottir dans ses bras une dernière fois avant de retrouver ceux de Lei et nos draps qui sentent trop bon pour un mec comme moi ; mais au lieu de ça, j’ai besoin de l’écraser sous ma chaussure pour qu’il compatisse et ressente les mêmes choses que moi, qu’on puisse pleurer à deux. « Il ne t’a pas abandonné Jayden. » Je souffle, j’expulse l’air par mon nez si violemment que j’en viens à m’interroger sur la quantité que les poumons peuvent stocker. Questions inutiles pour balayer, retarder l’instant. Et là encore, j’ai au fond du cœur quelque chose de poignant qui s’enfonce et me déchire les artères un à un. Lui a-t-il seulement déjà parlé de moi ? « Il nous a abandonné. T’es pas le seul dans cette merde. C’était ma vie à moi aussi. Il m’a promis des choses, il m’a promis la lune, il m’a fait jurer que tout irait bien. Que je remonterai la pente, et qu’il me suivra de près. On a fait nos conneries ensemble, et j’ai fais les miennes de mon côté aussi, je suis comme toi… » Ma voix est posée, elle m’échappe comme un texte, un récital presque biblique, de mes lèvres pourtant tremblantes. Mais la vérité, c’est que j’ai déjà les orbes noyés dans l’océan de mes doutes, et que les digues prêtes à céder menacent d’écouler les rivières sur les plaines de mes joues. Je viens soulever mon haut, dévoiler sur mes côtes le tatouage de lunes, les caresser du bout d’un doigt. « Moi aussi, j’ai fais comme toi. J’l’ai dans la peau. C’était un guerrier, Kyu, un battant, il a jamais rien lâché. Mais c’était pas quelqu’un fait pour mener la guerre toute sa vie, il a choisi de partir quand tout allait un peu mieux. » Je ravale difficilement mes larmes, et mes hoquets de cœur brisé. J’en viens à l’envier, lui et ses yeux aux reflets d’ivresse, et ces promesses qui dansent dans ses prunelles comme s’il oubliera tout le mal demain. « Après tout, qui reviendrait là où il a tant souffert ? Tu penses vraiment qu’il va revenir, t’es aussi naïf ? » Et je l’envie encore, sur ça. J’aimerai espérer aussi, tellement. Mon sourire de l’ange a disparu, j’ai la mâchoire crispée et le cou douloureux à force de déglutir, mais les barrages ont cédé et je ne sais pas quel piteux spectacle je suis en train d’offrir (pensée qui me tire un rire). Je dois avoir l’air d’un fou. Comme je l’étais avant ; je le redeviens juste par son absence.
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Re: Les hautes lumières. ☽ Jaysyr. | Sam 3 Sep - 18:02 Citer EditerSupprimer
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JAYDEN & TASYR
Il se rappelle, Jay, de ce jour où il est allé en galopant chez Kyu, le sourire aux lèvres, alors qu’il sonnait à la porte, attendant impatiemment qu’on vienne lui ouvrir. Et où les parents étaient arrivés, annonçant la terrible nouvelle de son départ. Il se rappelle, Jay, d’avoir hoché la tête et d’être rentré chez lui. Persuadé que ce n’était que passager. Persuadé qu’il avait mal entendu, mal compris. Persuadé que dès le lendemain, son meilleur ami serait de retour. Alors, il avait attendu, traversant le temps dans un brouillard de déni. Et finalement il l’a retrouvé, son monde s’est illuminé, et il est parvenu à se convaincre que c’était rien. Deux ans, c’est peu quand on s’appelle Jay. Mais deux ans, c’est long quand on attend. Pourtant il a réussi à refoulé tout ça. Oh il le sait bien, où est parti Kyu. Il le sait bien, qu’il va revenir. Mais cette fois il y arrive pas, il y arrive plus. Parce qu’elle s’est rouverte, la blessure de son départ, parce qu’elle a jamais vraiment cicatrisé, la plaie de son abandon. Et il a peur, Jay, au fond. Il a si peur. Peur de jamais le retrouver. Peur qu’il soit parti à cause de lui, aussi. Il a peur comme un gosse laissé pour la première fois à l’école, qui voit ses parents s’éloigner – la peur qu’ils ne reviennent jamais.
L’alcool tourbillonne dans ses veines, tourbillonne dans son esprit, embrouille ses perceptions, sa vision. Il voit trouble d’un coup – la faute aux larmes. Il a l’esprit en vrac, le moral par terre, même pas conscient de ses genoux qui heurtent le sol. Seulement conscient des mots qui claquent partout autour de lui, des mots qui pénètrent dans sa tête, tournent dans sa cervelle. Parce qu’ils ont l’air bien trop réel, les mots de Taz. Réel à en faire mal ; réel à le détruire. « S’il a promis… s’il a promis, alors il va le faire… » Brusque sursaut de colère sitôt disparu, la voilà, la pauvre chose, l’être lamentable laissé derrière, qui se recroqueville un peu plus. Il lève la tête, lève ses yeux brouillés, les fixe sur ce tatouage, ce symbole d’amour encré dans sa peau à jamais. Et il a envie de vomir, Jay, il a envie de crever. Parce que pour la première fois, il se rend compte qu’il est pas tout seul – pour la première fois il prend conscience de son remplaçant. De toutes ces années, passées à attendre le retour de celui qui est parti, toutes ces années où Kyu ne pensait probablement plus à lui, heureux aux côtés de cet autre, heureux aux côtés de Taz. Et il a envie de vomir, Jay, il a envie de crever – pour oublier cette douleur qui pulse dans son cœur, réveillée par ce visage aux traits poupins. « Tu racontes n’importe quoi, elle va se finir sa guerre. Elle va se finir. Parce que… parce que j’lui ai promis… qu’il allait être heureux. » Ils sortent difficilement, ces mots, brûlent sa gorge déjà meurtris par la flamme alcoolisée. Il a échoué Jay, échoué à l’aider, échoué à injecter sa joie légendaire dans la vie de son ami. Echoué. Tout simplement. « Je suis pas naïf, il va revenir ! Il l’a promis, il va revenir ! Comment tu peux te prétendre son ami, si t’es même pas foutu de le croire. J’croyais que t’étais son ami. J’croyais que t’étais… » Il finit pas sa phrase, il y arrive pas – c’est trop difficile. A la place, il s’assoit, à même le sol sale, passant ses bas autour de ses jambes, comme pour se bercer, comme pour se réconforter – comme pour tenter de rendre au monde sa tangibilité. « Pars, va-t’en, j’veux plus t’entendre, va-t’en. » Et il ferme les yeux pour le faire disparaître de sa vision – et espérer que ça le fasse disparaître tout court. Il en veut plus, de ses mots-poisons, de ses mots-venins, de ses mots destructeurs, qui se sont pourtant frayer un chemin à travers ses chairs, pour tenter de faire pourrir son cœur. C’est trop dur, trop dur. Il en a pas la force, Jay. Il est pas fort, Jay. Il peut pas affronter la réalité, il peut pas affronter l’abandon. « Reviens, Kyu, reviens, prouve-lui qu’il a tort. » Il chuchote, d’une voix faible, taisant les véritables mots qui tournent en boucle dans son cœur.
(Reviens, me laisse pas, moi sans toi, ça existe pas, reviens.)
L’alcool tourbillonne dans ses veines, tourbillonne dans son esprit, embrouille ses perceptions, sa vision. Il voit trouble d’un coup – la faute aux larmes. Il a l’esprit en vrac, le moral par terre, même pas conscient de ses genoux qui heurtent le sol. Seulement conscient des mots qui claquent partout autour de lui, des mots qui pénètrent dans sa tête, tournent dans sa cervelle. Parce qu’ils ont l’air bien trop réel, les mots de Taz. Réel à en faire mal ; réel à le détruire. « S’il a promis… s’il a promis, alors il va le faire… » Brusque sursaut de colère sitôt disparu, la voilà, la pauvre chose, l’être lamentable laissé derrière, qui se recroqueville un peu plus. Il lève la tête, lève ses yeux brouillés, les fixe sur ce tatouage, ce symbole d’amour encré dans sa peau à jamais. Et il a envie de vomir, Jay, il a envie de crever. Parce que pour la première fois, il se rend compte qu’il est pas tout seul – pour la première fois il prend conscience de son remplaçant. De toutes ces années, passées à attendre le retour de celui qui est parti, toutes ces années où Kyu ne pensait probablement plus à lui, heureux aux côtés de cet autre, heureux aux côtés de Taz. Et il a envie de vomir, Jay, il a envie de crever – pour oublier cette douleur qui pulse dans son cœur, réveillée par ce visage aux traits poupins. « Tu racontes n’importe quoi, elle va se finir sa guerre. Elle va se finir. Parce que… parce que j’lui ai promis… qu’il allait être heureux. » Ils sortent difficilement, ces mots, brûlent sa gorge déjà meurtris par la flamme alcoolisée. Il a échoué Jay, échoué à l’aider, échoué à injecter sa joie légendaire dans la vie de son ami. Echoué. Tout simplement. « Je suis pas naïf, il va revenir ! Il l’a promis, il va revenir ! Comment tu peux te prétendre son ami, si t’es même pas foutu de le croire. J’croyais que t’étais son ami. J’croyais que t’étais… » Il finit pas sa phrase, il y arrive pas – c’est trop difficile. A la place, il s’assoit, à même le sol sale, passant ses bas autour de ses jambes, comme pour se bercer, comme pour se réconforter – comme pour tenter de rendre au monde sa tangibilité. « Pars, va-t’en, j’veux plus t’entendre, va-t’en. » Et il ferme les yeux pour le faire disparaître de sa vision – et espérer que ça le fasse disparaître tout court. Il en veut plus, de ses mots-poisons, de ses mots-venins, de ses mots destructeurs, qui se sont pourtant frayer un chemin à travers ses chairs, pour tenter de faire pourrir son cœur. C’est trop dur, trop dur. Il en a pas la force, Jay. Il est pas fort, Jay. Il peut pas affronter la réalité, il peut pas affronter l’abandon. « Reviens, Kyu, reviens, prouve-lui qu’il a tort. » Il chuchote, d’une voix faible, taisant les véritables mots qui tournent en boucle dans son cœur.
(Reviens, me laisse pas, moi sans toi, ça existe pas, reviens.)
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Re: Les hautes lumières. ☽ Jaysyr. | Dim 11 Sep - 19:42 Citer EditerSupprimer
les hautes lumières
JAYDEN & TASYR
J'aimerais tellement lui dire que c'est faux, qu'il ne connaît pas le monde. Que le monde n'est pas juste ce qu'il voit, qu'il ignore les gens qui se saignent dans l'ombre pour que le bien et le mal s'égalisent, que les gens comme lui ont des problèmes qu'on aimerait tant avoir, tant ils sont surfaits. Qu'on échangerait volontiers leurs peines de cœur contre nos peines à vivre, qu'on troquerait sans mal nos sandwichs trop chers contre leurs cautions trop élevées. J'aimerais hurler qu'il parle sans savoir, qu'il ne connaît pas Moonkyu puisqu'il n'a pas vécu ce que nous avons vécu ; j'aimerais lui crier que moi aussi (ouais, moi aussi) j'aurais prié pour partir, ne plus revenir, et que j'attendais désormais mon tour, démuni d'un frère d'armes. J'aimerais, mais j'ai pas le courage, et malgré tout, j'ai une once de lucidité qui m'empêche de lui ouvrir les yeux. Qu'est-ce que je connais du monde, si ce n'est ses travers ? J'en vois que la moitié, moi aussi, la mauvaise cependant et là seulement persiste notre différence. Et Kyu, qu'était-il ? Un entre deux entre le ying et le yang ? Je sais pas. Je sais plus. Je sais plus rien, maintenant qu'il est plus là pour m'éclairer, pour m'expliquer, depuis qu'il a emporté mes réponses avec lui là-bas. Depuis qu'il me manque, comme il manquerait le soleil en été ; comme il manquerait l'évidence à l'univers. Et j'sais pas, j'sais pas non plus si je suis capable de continuer sans lui, si je suis capable de réussir seul à panser mes écorchures, si je suis capable de me relever une fois les genoux à terre. J'sais pas, j'sais pas si mon cœur continue à battre la cadence, ou s'il défaille lui aussi, s'il survole l'océan pour le rejoindre ; j'sais pas si j'arrive à respirer, ou si je m'étouffe. Reviens, dis moi. Explique-moi pourquoi les jours pleurent quand j'ai mal de toi. Pourquoi les nuits sont ternes, quand j'ai froid de toi.
Pourquoi j'ai peur du Noir depuis qu'il m'a abandonné.
Qu'il nous a abandonné, et je vois en Jayden quelqu'un qui a mal, comme moi, eu importe nos univers différents, opposés. Quelqu'un qui pleure comme moi, qui peine à respirer. Je vois un mec que je peux manipuler, utiliser. J'veux pas tomber seul, Kyu, tu m'as appris la compagnie ; j'veux pas mourir seul, frère, tu m'as apprivoisé et domestiqué.
Seulement, je peux pas penser droit, j'ai la réflexion qui arque le dos, qui hérisse les poils, qui veut pas entendre ; j'peux pas accepter ses mots qui me font mal, qui me laissent imaginer que lui, ce mec misérable qui sait rien de notre univers, ait réussi là où j'ai échoué. Alors tant pis, et que l'épine s'enfonce, qu'elle blesse son palpitant, qu'il souffre de sa pointe ; j'ai trop mal à l'être, à l'âme, à moi, pour ça. « Tu lui as promis des choses sans savoir ? Est-ce que t'as vu, au moins, à quoi ressemblaient nos journées pendant que tu étais sagement occupé à souffrir du choix cornélien du restaurant où tu allais poser ton cul ? » Un type comme lui ignore tout de la noirceur, et moi, j'me fais une promesse. Je me promets de lui montrer, parce qu'il me fait de la peine sous ses faux airs et ses grands yeux. J'essuie piteusement mes joues qui s'inondent sans mon bon vouloir, ravale l'amertume d'un sanglot gelé. Je m'agenouille en face, l'analyse sous ses coutures enfantines. Je lui montrerai le Noir, pour qu'il comprenne Moonkyu, son départ, son abandon. Qu'il survive par ses désillusions. Qu'il souffre de la réalité, parce que seul, c'est bien trop dur à affronter. « Tu sais le combat que c'était, de remonter l'escalier quand on avait trop bu (trop bu pour oublier) alors que t'étais encore en train de serrer ton oreiller ? Tu sais combien on aurait aimé, certains matins, pouvoir pester contre le réveil, et non contre les putains de chiens qui te pissent dessus ? » Je sais pas si je parle pour lui, ou si je parle pour moi ; j'sais pas s'il était comme ça. C'était mon cas. Est-ce qu'il avait été bercé dans la lumière, sans m'en avertir ? J'expire longuement, plisse mes paupières pour les fermer ; ravale ma colère, mon dégoût, ma culpabilité, ma peine. Et je pose mes mains sur ses genoux, avant que l'une d'elle ne vienne frotter ses cheveux. « Vie sa vie une soirée, avec moi. Tu comprendras qu'il ne reviendra pas. »
Pourquoi j'ai peur du Noir depuis qu'il m'a abandonné.
Qu'il nous a abandonné, et je vois en Jayden quelqu'un qui a mal, comme moi, eu importe nos univers différents, opposés. Quelqu'un qui pleure comme moi, qui peine à respirer. Je vois un mec que je peux manipuler, utiliser. J'veux pas tomber seul, Kyu, tu m'as appris la compagnie ; j'veux pas mourir seul, frère, tu m'as apprivoisé et domestiqué.
Seulement, je peux pas penser droit, j'ai la réflexion qui arque le dos, qui hérisse les poils, qui veut pas entendre ; j'peux pas accepter ses mots qui me font mal, qui me laissent imaginer que lui, ce mec misérable qui sait rien de notre univers, ait réussi là où j'ai échoué. Alors tant pis, et que l'épine s'enfonce, qu'elle blesse son palpitant, qu'il souffre de sa pointe ; j'ai trop mal à l'être, à l'âme, à moi, pour ça. « Tu lui as promis des choses sans savoir ? Est-ce que t'as vu, au moins, à quoi ressemblaient nos journées pendant que tu étais sagement occupé à souffrir du choix cornélien du restaurant où tu allais poser ton cul ? » Un type comme lui ignore tout de la noirceur, et moi, j'me fais une promesse. Je me promets de lui montrer, parce qu'il me fait de la peine sous ses faux airs et ses grands yeux. J'essuie piteusement mes joues qui s'inondent sans mon bon vouloir, ravale l'amertume d'un sanglot gelé. Je m'agenouille en face, l'analyse sous ses coutures enfantines. Je lui montrerai le Noir, pour qu'il comprenne Moonkyu, son départ, son abandon. Qu'il survive par ses désillusions. Qu'il souffre de la réalité, parce que seul, c'est bien trop dur à affronter. « Tu sais le combat que c'était, de remonter l'escalier quand on avait trop bu (trop bu pour oublier) alors que t'étais encore en train de serrer ton oreiller ? Tu sais combien on aurait aimé, certains matins, pouvoir pester contre le réveil, et non contre les putains de chiens qui te pissent dessus ? » Je sais pas si je parle pour lui, ou si je parle pour moi ; j'sais pas s'il était comme ça. C'était mon cas. Est-ce qu'il avait été bercé dans la lumière, sans m'en avertir ? J'expire longuement, plisse mes paupières pour les fermer ; ravale ma colère, mon dégoût, ma culpabilité, ma peine. Et je pose mes mains sur ses genoux, avant que l'une d'elle ne vienne frotter ses cheveux. « Vie sa vie une soirée, avec moi. Tu comprendras qu'il ne reviendra pas. »
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Re: Les hautes lumières. ☽ Jaysyr. | Mar 13 Sep - 17:11 Citer EditerSupprimer
les hautes lumières
JAYDEN & TASYR
Et il veut pas lever la tête, Jay, il veut plus lever la tête, poser ses yeux noyés sur cet être qu’il abhorre. Il veut pas voir cette lueur dans ses prunelles, ces mensonges dans son regard. Alors il courbe l’échine, Jay, se ratatine devant la force supérieure qu’il n’a plus le cœur de combattre – qu’il n’a plus l’énergie de repousser. Pauvre gamin bien trop naïf pour être humain ; pauvre gamin né dans le mauvais monde, dans cet univers qu’il ne connait pas. Qu’il ne veut pas connaître. Être pathétique qui ploie sous les mots-poignards, se noie sous la violence des mots haineux. Il perd pied, perd la tête aussi. Il veut fuir, mais peut pas, bloqué par celui bien décidé à le détruire. Il veut fuir, mais peut pas, bloqué par ses jambes tremblantes, son corps traître. Les mots s’enfoncent dans son cœur, perce son âme, bien trop douloureux, probablement plus encore que ce qu’il imagine, Tasyr. Parce qu’il lui rappelle, cette vie, ni avant, ni après, cet entre-deux qu’il ne veut plus voir. Il lui rappelle cette vie sans lui, cette vie sans lui. Ces deux années qu’il a refoulé dans un coin de son esprit, comme si elles n’avaient jamais eu lieu. Ces deux années qui ont pourtant bien compté pour Kyu – ces deux années où il a existé loin de lui, où la lune a réussi à avancer sans son soleil. Et il veut pas se rappeler de ça, Jay, il veut pas savoir ça, Jay. Il veut pas voir, Jay, préfère rester aveugle.
Mais il a pas le choix. Il frémit sous le contact soudain, se recroqueville sous la caresse. Il le supporte pas, ce toucher faussement affectueux ; cette haine qui transparaît pourtant dans les gestes de l’autre, et brûle son cœur à lui. Il secoue la tête, rejette cette main, l’éjecte de ses cheveux, comme s’il pouvait la renvoyer à jamais. Et pendant un instant il hésite à arrêter – tout. Arrêter de parler, arrêter de penser, arrêter de respirer (arrêter de vivre). Arrêter et attendre qu’il s’en aille, le diable de colère, lassé d’attendre une réaction de sa proie. Mais il peut pas, il y parvient pas. Alors finalement il se redresse – difficilement. Il affronte son démon, l’adulte à tête d’enfant. Il braque farouchement ses yeux dans ceux de son cauchemar, l’adulte à l’âme d’enfant. Mu par une force inconnue, agité par les soubresauts alcooliques, il déverse ses mots comme un torrent. « Tu sais rien. Tu sais rien de c’qu’on a vécu, avec Kyu. T’as jamais connu le Kyu que j’ai connu, le Kyu d’avant la Corée. Tu le connais pas comme j’le connais. Tu l’as pas connu avec sa maladie, tu l’as pas connu quand il l’a apprise, tu l’as pas connu quand il a essayé de s’y acclimaté, tu l’as pas connu quand il a appris à vivre avec. Tu l’as pas connu ! Tu le connais pas ! TU. NE. SAIS. RIEN. » Et il crache sa haine, crache sa rage, sa rancœur, contre cette homme qui prétend vouloir voler sa place, combler ce vide dans la vie de Kyu, ce vide qui n’appartient qu’à lui, ne peut être effacé que par sa présence. Il se lève brutalement, manque tomber. Le monde tourne autour de lui, plus rien n’a de sens. Sa vue se bouche, ne laissant qu’un point, pas lumineux, beaucoup trop obscur – point focalisé sur ce visage haï à cet instant précis. Et il a jamais ressenti ça auparavant, Jay. Il a jamais détesté auparavant, Jay. Il se noie dans ses sentiments, se perd dans les méandres de son esprit, dans ce trou noir dont il ignorait l’existence. « Vas-y, montre-la moi sa vie ! montre-la moi, ta vie ! Vas-y, montre-la moi, mais ça changera rien, ça changera rien à c’que j’ai vu, à c’que j’ai vécu, ça changera rien au fait que tu l’as jamais vu, ce moment, où ses yeux s’illuminent quand il sourit, quand il sourit vraiment. Vas-y, montre-moi ce bout de sa vie qu’est loin d’être la vraie. Montre-la-moi. VAS-Y. » Et il crie, et il serre les poings, ignorant l’endroit où il se trouve, ignorant les potentiels témoins de cette scène de cauchemar. Il avance, titube, laisse derrière lui l’homme, alors qu’il se rend au bar pour commencer un nouveau verre. Il veut bien aller en enfer, Jay ; mais il accepte pas d’y aller seul. Son regard flou se détourne, se dirige vers sa silhouette, alors qu’il expulse ces derniers mots « J’te déteste. »
Mais il a pas le choix. Il frémit sous le contact soudain, se recroqueville sous la caresse. Il le supporte pas, ce toucher faussement affectueux ; cette haine qui transparaît pourtant dans les gestes de l’autre, et brûle son cœur à lui. Il secoue la tête, rejette cette main, l’éjecte de ses cheveux, comme s’il pouvait la renvoyer à jamais. Et pendant un instant il hésite à arrêter – tout. Arrêter de parler, arrêter de penser, arrêter de respirer (arrêter de vivre). Arrêter et attendre qu’il s’en aille, le diable de colère, lassé d’attendre une réaction de sa proie. Mais il peut pas, il y parvient pas. Alors finalement il se redresse – difficilement. Il affronte son démon, l’adulte à tête d’enfant. Il braque farouchement ses yeux dans ceux de son cauchemar, l’adulte à l’âme d’enfant. Mu par une force inconnue, agité par les soubresauts alcooliques, il déverse ses mots comme un torrent. « Tu sais rien. Tu sais rien de c’qu’on a vécu, avec Kyu. T’as jamais connu le Kyu que j’ai connu, le Kyu d’avant la Corée. Tu le connais pas comme j’le connais. Tu l’as pas connu avec sa maladie, tu l’as pas connu quand il l’a apprise, tu l’as pas connu quand il a essayé de s’y acclimaté, tu l’as pas connu quand il a appris à vivre avec. Tu l’as pas connu ! Tu le connais pas ! TU. NE. SAIS. RIEN. » Et il crache sa haine, crache sa rage, sa rancœur, contre cette homme qui prétend vouloir voler sa place, combler ce vide dans la vie de Kyu, ce vide qui n’appartient qu’à lui, ne peut être effacé que par sa présence. Il se lève brutalement, manque tomber. Le monde tourne autour de lui, plus rien n’a de sens. Sa vue se bouche, ne laissant qu’un point, pas lumineux, beaucoup trop obscur – point focalisé sur ce visage haï à cet instant précis. Et il a jamais ressenti ça auparavant, Jay. Il a jamais détesté auparavant, Jay. Il se noie dans ses sentiments, se perd dans les méandres de son esprit, dans ce trou noir dont il ignorait l’existence. « Vas-y, montre-la moi sa vie ! montre-la moi, ta vie ! Vas-y, montre-la moi, mais ça changera rien, ça changera rien à c’que j’ai vu, à c’que j’ai vécu, ça changera rien au fait que tu l’as jamais vu, ce moment, où ses yeux s’illuminent quand il sourit, quand il sourit vraiment. Vas-y, montre-moi ce bout de sa vie qu’est loin d’être la vraie. Montre-la-moi. VAS-Y. » Et il crie, et il serre les poings, ignorant l’endroit où il se trouve, ignorant les potentiels témoins de cette scène de cauchemar. Il avance, titube, laisse derrière lui l’homme, alors qu’il se rend au bar pour commencer un nouveau verre. Il veut bien aller en enfer, Jay ; mais il accepte pas d’y aller seul. Son regard flou se détourne, se dirige vers sa silhouette, alors qu’il expulse ces derniers mots « J’te déteste. »
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