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el padre ♣ ft. lee jaehyuk

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Re: el padre ♣ ft. lee jaehyuk | Ven 23 Nov - 21:01
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el padre
Big bro & Ptit bro

Et alors, qu'est-ce qu'on fait à propos du père ? De notre argent ? De nous ?
Je n'étais pas vraiment fier de mon parcours. J'étais encore moins fier de le raconter à mon petit-frère. Alors je lui épargnais les détails dont seul Juhyeon et quelques autres qui avaient partagé mon passé étaient au courant. Je ne lui disais que les grandes lignes directrices. Il n'avait pas besoin de tout savoir. Non, il n'avait clairement pas besoin de savoir tout ce qu'il s'était passé. Il avait juste besoin de savoir que le père n'était pas un ange. Loin de là. Enfin, ça, ne s'en était-il pas rendu compte, au final ? Il venait de m'annoncer que c'était fini, avec le vieux. Il avait perdu ses deux fils. Ça me rendait plutôt content. « Bien fait », c'était ce que je me disais. C'était bien fait pour lui et son avidité. On disait que les liens de sang étaient spéciaux, et je n'y avais jamais cru. Du moins, j'avais arrêté d'y croire quand j'avais été jeté du domicile familial. Ce fut alors comme si je n'avais jamais eu de famille. Comme si je ne partageais mon sang avec personne. Mais, aujourd'hui, je sentais bien que je n'étais pas le seul à avoir ce liquide rouge si spécial dans mes veines. Jaehyuk et moi avions une connexion particulière. Et ça, c'était parce qu'on était frères. Frères de sang. Je finis de tartiner mes tranches de pain lorsqu'il finit sa phrase, et j'esquissai un petit sourire absent de joie. « Tu n'es pas un monstre Jaehyuk. T'as cru que le père était une bonne personne et je t'en veux pas vraiment. En tant que favori, pourquoi est-ce que tu détesterais et remettrais en doute celui qui te donne ces privilèges ? Si nos rôles avaient été inversés, je crois que je t'aurais haï, aussi. Et je ne suis même pas sûr si je me serais rendu compte que quelque chose n'allait pas. Toi, tu l'as fait. C'est le principal. » Je regardai mon petit-frère, cette fois avec un sourire rempli d'une émotion positive. Je pris ensuite une bouchée de ma tartine parce que mon ventre me le demandait. On se retrouvait à parler de choses pareilles un samedi matin tout à fait banal. On aurait pu éviter le sujet, mais est-ce que ç'aurait été la chose à faire ? Ça faisait des mois qu'on tournait autour du pot, il fallait bien qu'un jour, l'un d'entre nous saute à l'eau. Ma bouche avait donc décidé qu'aujourd'hui serait le jour où on en parlera, et à vrai dire, ça me faisait du bien. C'était agréable de pouvoir enfin tout se dire sans se demander si on devrait vraiment parler de ce sujet. Ça devrait sûrement être la même chose du côté de mon petit-frère. Il devait se dire que c'était plaisant de pouvoir parler de ce sujet sensible. On ne se le disait pas directement, mais au fond, on le savait tous les deux. On aurait dû en parler plus tôt, mais, ne voulant pas casser ce lien qu'on tentait de bâtir, on ne l'avait pas fait. Qui aurait su que c'était en parlant de ça qu'on le solidifierait ? A ses mots, je hochai de la tête, avalant le morceau que j'avais dans la bouche depuis tout à l'heure. « Je suis content de te voir changé comme ça ! Je me suis fait violence pour ne pas te repousser ce jour-là, je te jure. T'étais vraiment un petit con à l'époque, ça n'a pas aidé ! Enfin, être un petit con ne fait pas de toi un monstre. Sinon, je serais un monstre depuis ma naissance. » Je l'avais dit sur le ton de la plaisanterie, ajoutant même un petit rire. Mais ça, c'était peut-être vrai. Vu mes actions, j'en étais peut-être un, de monstre. J'étais le vrai monstre parmi nous deux. Et je n'en étais clairement pas fier. J'étais censé être une sorte de modèle pour lui, non ? Il était mon petit-frère, celui qui était né deux ans après moi, celui qui avait moins d'expérience que moi. Paradoxalement, c'était lui qui était le meilleur en tout. Il avait beau avoir moins vécu que moi, il semblait me dépasser en tout. C'était pour ça que j'avais été mis à l'écart et que j'étais rapidement devenu jaloux de lui. Mais maintenant qu'il avait renoncé au père, j'avais toujours fait de mon mieux pour lui délivrer le bon côté de moi. Le côté que je montrais un peu à tout le monde tout en retirant le côté idiot pour ne pas passer pour un total imbécile. Même si, soyons clair, je ne devenais pas intelligent du jour au lendemain : Jaehyuk était né avec des neurones, moi sans. Pourtant, je faisais de mon mieux pour m'en créer, et c'était comme ça que j'essayais de montrer ma force et de servir d'exemple à ce dernier. C'était pour cette raison que je n'avais pas trop envie qu'il sache tout ce que j'avais fait. Ce n'était pas digne d'un grand-frère, tout ça. Il y avait peut-être des gens qui avaient fait pire mais ça n'empêchait que je n'en étais pas satisfait. J'aurais préféré vivre une vie sans encombre pour pouvoir lui dire qu'il ne s'était strictement rien passé dans ma vie. J'aurais pu lui mentir sur mon passé, c'était vrai ; mais je refusais de dire la même chose à lui qu'à tous les autres que je croisais dans ma vie. Si je mentais sans scrupule aux gens qui n'étaient pas proches de moi, hors de question de le faire pour Jaheyuk. Si je mentais à mon propre petit-frère, mon honneur disparaîtra au moment où je lui dirais qu'il ne s'était rien passé d'important dans ma vie. Je préférais encore qu'il ne me voie plus comme un modèle plutôt que de lui mentir. C'était sûrement parce que j'étais le grand-frère et que je ne pouvais pas mentir à mon propre petit-frère, hein ? Alors, reposant le verre dans lequel je venais de prendre une gorgée de café, je regardai la nappe de la table. Un sango pourrait débarquer à tout moment et rétablir la vérité sur mon passé, mais qu'importe. Il fallait que je lui dise. Maintenant. « Franchement, tu n'es pas totalement responsable. Tu y es certainement pour quelque chose mais ne te jette pas la faute que sur toi. Le père est le plus grand fautif dans l'histoire. J'ai sombré dans la merde quand j'ai quitté cette maison. Je sais pas si tu te souviens de lui, ça te dit quelque chose, Won Juhyeon ? Son père est justement le PDG auquel le père est affilé. Juhyeon est devenu mon meilleur ami, et lui aussi s'est retrouvé en pensionnat. C'est avec lui que j'ai fait les pires trucs de ma vie. J'ai traîné avec un gang, j'ai fumé et pas que du tabac, je me suis drogué, je faisais des jeux dangereux, je harcelais les gens, je buvais de l'alcool et je passais à travers tous les interdits, juste pour me la péter. Je sais pas combien de gens j'ai battu et avec combien de gens je me suis battu, même. Ton grand-frère, c'était la terreur du quartier avec ses potes ! » Je fis un sourire sans vie, ne lâchant pas ce point vide du regard. « Donc, tu vois, c'est pas plus mal que tu sois resté avec le père pendant ton adolescence. Au moins, ça t'aura évité bon nombre de conneries. » Et, comme si je voulais m'empêcher de parler, je bus mon café.
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Re: el padre ♣ ft. lee jaehyuk | Sam 12 Jan - 13:13
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el padre
Hyung & Moi

Chaque mot qui sortait de la bouche de Jaesang, son petit-frère le gravait dans son corps, sa tête, son cœur. Pour être sûr que jamais ces mots là ne s’échappent. Sa bonne mémoire ne lui suffisait pas, il les emporterait plus loin. Il les enlèverait des yeux vides de son aîné et les remplacerait par des éclats de joie. Il rattraperait les années passés, les jeux qu’il n’avait pas partagés, les rires qu’il n’avait pas donné, les secrets qu’il n’avait pas confié. Longue serait la route, ils avaient le temps de les effacer un à un tous ces mauvais souvenirs. Ensemble. Si un grand-frère a un devoir, le petit en a de même. Tous deux y avaient échoués. Mais au moins, Jaesang avait essayé ; et Jaehyuk, désormais, ferait tout pour se rattraper.

Les deux jeunes gens se fréquentaient depuis quelques temps déjà. Cependant ce matin là, Jae Hyuk était propulsé des mois en arrière, devant les poings serrés de son frère. Il avait eu l’impression de si bien le connaître, ses postures, ses tournures de phrases, ses tics, ses petites habitudes, ses défauts, ses qualités. Il y était habitué maintenant. Le benjamin se disait qu’il arrivait enfin à le cerner, à comprendre qui il était malgré les quelques rires qui sonnaient faux et les regards perdus. C’était connu, Jaehyuk avait un bon esprit d’analyse. Il avait compris depuis longtemps qu’il lui cachait bien des choses de son passé. Qu’il les cachait à tout le monde en fait. Il passait sa vie à prétendre être quelqu’un de bien, ils se ressemblaient bien sur ce point. C’était ce sentiment là. L’impression de se retrouver devant un parfait inconnu, quelqu’un dont on croyait tout savoir et tout d’un coup, il redevient un étranger. Une bizarrerie, un alien dans le monde de Jaehyuk. Et à la fois, il sentait qu’ils étaient reliés plus que jamais. Deux frères peuvent vivre séparés dans deux monde différents mais ne se ressemblent-ils pas un peu trop à la fin ? Sans le savoir, ils partageaient les mêmes hontes, les mêmes peurs, les mêmes blessures. Et puis surtout, les mêmes pardons. Se pardonner à soi-même, de toutes les erreurs qu’on avait faites, de toutes les mauvaises facettes qu’on avait montré à ce monde si beau et des comportements horribles qu’on devait prendre en compte quand on se reconstruisait, quand on essayait de se dire que, malgré tout, on pouvait être quelqu’un de bien. Lui, il essayait de se pardonner depuis longtemps, mais était-ce le cas de son grand frère dont l’impassibilité passagère de son visage d’ordinaire si expressif lui faisait froid dans le dos ? Le savait-il même, qu’il avait le droit de passer sur tout ça et de grandir différemment ? Comme si lui rappeler plusieurs fois que Jaehyuk n’était pas un monstre sous-entendait que le monstre, c’était lui. Il lui parlait de tout ça, si calmement, et pourtant il semblait si ému derrière les petits gestes fait pour se dissimuler. Après lui avoir avoué tout ça, il devait un peu appréhender la réponse de son petit-frère non ? Le temps qu’il assimile ses paroles, un trop long silence s’était installé. Il se devait de le briser.

« Wahou, mon frère c’est vraiment quelqu’un. Savoir que tu es passé par tout ça et voir la personne que tu es aujourd’hui, ça me rend fier d’avoir un grand-frère aussi cool et fort que toi ! » lui annonça-t-il dans un grand sourire.

Parce qu’il le pensait sincèrement. Comment aurait-il fini lui s’il avait été dans la fosse aux lions ? Il avait déjà du mal à gérer ses problèmes d’ego et la confrontation du monde dans lequel il avait été bordé au monde réel. S’il était passé par ce monde qui paraissait si sombre et où Jaesang et Juhyeon avaient vécus, comment pourrait-il se retrouver dans l’une des universités les plus prestigieuses de ce pays à tranquillement beurrer ses tartines ? Il comprenait bien qu’il revenait de loin et le chemin qu’il avait parcouru, le chemin qu’il continuait à parcourir pour s’éloigner de toutes ces erreurs qu’il semblait si amèrement regretter au point qu’il ai du mal à se retenir de se taire complètement sur le sujet. Et il était fier de connaître quelqu’un comme lui. Une personne inspirante. Et ce type là, se trouvait être en plus son frère. Quel exemple, quel modèle pour un mec comme lui qui avait encore tant à traverser. Il lui redonnait de l’espoir, la lueur qui l’écarterait définitivement de cet univers remplis de prédateurs et dénué de bienveillance dans lequel on l’avait fait grandir. Il en ressentait encore bien trop l’influence et elle était en conflit avec son être intérieur. Son lui qui voulait changer les choses, ce lui qui voulait monter tout en haut sans marcher sur les autres pour y arriver, ce lui qui regardait les garçons différemment dans la société encore bien trop conservatrice dans laquelle il évoluait. Jaesang était tellement honnête avec lui, arriverait-il un jour à l’être autant ? Il avait trouvé un frère, une famille, il avait si peur de tout perdre à nouveau. Mais n’était-ce pas la peur qui venait de passer dans le cœur de son grand-frère ? Mais le moment n’était pas bien choisi, la conversation était autre. Elle concernait les deux sangs qui se regardaient dans le blanc des yeux avec des émotions mélangés, bien plus positives que négatives mais des questions, des non-dits restaient à éclaircir.

« Merci de me dire tout ça. C’est précieux. Je suis sincère. Que tu arrives à me dire tout ça… Je pense que c’est important, non ? Que tu me dises que malgré mon comportement tu ne me tiennes pas entièrement responsable… ça… Merci aussi. »

Il avait du mal à parler tandis que l’émotion lui prenait à la gorge. Il n’était pas un monstre, son frère ne lui en voulait pas parce qu’après tout il avait su changer. Cependant, l’entendre de sa bouche était autre chose que de se persuader soi-même qu’il lui passerait ses méchancetés contre un petit-frère qui désormais agissait correctement.

« J’étais jeune, j’étais con, j’étais aveugle…. Je regrette tellement. J’aurais aimé qu’on est une enfance heureuse tous les deux. Mais bon. On refait pas l’histoire, comme on dit… C’est pour ça que je suis venu te retrouver, même si je savais pas trop à quoi m’attendre. J’avais besoin d’une vraie famille, pas d’un amour dicté par de l’avarice. Et le fait que tu ne vives plus dans ce monde depuis si longtemps, je me suis dit que tu avais sûrement autre chose à m’offrir et que moi en échange, je pouvais aussi t’offrir l’amour que tu as injustement jamais reçu et que tu as toujours mérité autant, voir plus, que moi. »
Il renifla, pris une gorgée de café pour se calmer et continua avant que Jaesang ne puisse reprendre la parole.

« Ce que je veux dire c’est pas que je vaux rien mais que tu vaux tout autant et qu’en plus tu as le mérite d’avoir fait de ton mieux pendant que moi je prenais tout ce que j’avais comme acquis. Mon adolescence… Oui, je considère que là encore j’ai juste pris ce qu’on me donnait, j’ai profité de la protection que m’apportait un foyer mais honnêtement… Je suffoquais. Enfin ça paraît sûrement dérisoire pour toi. Mais puisque tu as été si sincère avec moi, alors je te le dis. Le monde stérile dans lequel j’ai vécu et les trucs horribles que j’ai vu, je suis bien content que tu n’ai pas eu à les supporter. Alors ce que tu as vécu, certes, tu en es peut-être pas fier vu la manière dont tu m’en parles, mais c’est une partie de toi et ça fait qui tu es aujourd’hui. Et ça, tu dois aussi en être fier.  » finit-il dans un sourire.

Corruption, vies détruites sur un appel, un ordre, cris, pleurs, manifestations, suicides, politique, mariages arrangés, jeunesses sacrifiés… Quand il y réfléchissait plus longuement, il ne savait pas laquelle de la fosse aux lions ou de la fosse aux serpents était la moins dangereuse.

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Re: el padre ♣ ft. lee jaehyuk | Dim 3 Fév - 0:21
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Et alors, qu'est-ce qu'on fait à propos du père ? De notre argent ? De nous ?
Je me rappelais de tous ces souvenirs avec un goût amer dans la bouche. Peut-être était-ce mon café qui était trop amer. Devrais-je ajouter du sucre ? J'avais presque envie de le faire, mais je ne le fis pas. Peu importe à quel point mon café était sucré, au final, c'était juste pour cacher son vrai goût. En ajoutant du sucre, je ne faisais que cacher ce qu'il était. Si je pouvais comparer ma vie au café que j'avais dans les mains, je dirais que ce café brun était mon passé, et que le sucre était tous mes efforts pour dissimuler le goût amer de ce café. Personne ne voulait boire un café aussi amer, après tout. Ce n'était pas bon. J'avais alors toujours fait de mon mieux pour ajouter autant de sucre qu'il était nécessaire pour qu'ils trouvent ça enfin bon. Pourtant, aujourd'hui, j'offrais un café sans aucun sucre à Jaehyuk. Parce que je ne voulais plus sucrer le café que je donnais à mon petit-frère. C'était dans cette pensée-là que je me livrais entièrement sur mon passé, sur ce qui faisait que j'étais moi, aujourd'hui. Les bêtises que j'avais faites, je n'osais même pas mettre un nom dessus. Je disais toujours que c'étaient des bêtises, des conneries, que j'étais entré dans un monde noir mais qu'aujourd'hui, je m'en étais sorti. Je ne disais presque jamais de quoi il était question, même lorsque je pensais moi-même à toutes ces choses-là. Sûrement pour m'en préserver. Je finissais par me censurer moi-même avec trop plein de sucre, à force d'en ajouter. Je devrais arrêter de dire que c'étaient des bêtises, mais que c'étaient de la drogue, de l'alcool, des bagarres. Je devrais arrêter de dire que c'était un monde noir, mais que c'était du trafic de drogue, du harcèlement, des menaces. Je devrais arrêter de tout cacher, tout simplement. Mais comment pourrais-je le faire sans savoir comment ils allaient réagir ? Non, ils allaient forcément mal réagir. Personne n'aimait le café amer, personne n'aimait la drogue, l'alcool, les bagarres. Peut-être que certains l'appréciaient, mais en apparence, ils feront toujours comme s'ils n'aimaient pas ça. Je ne pouvais pas les en blâmer, j'étais pareil. Depuis que j'étais entré à l'université, j'avais toujours fait semblant. Toujours fait semblant de ne jamais avoir touché à la drogue et de ne pas savoir me battre. L'imbécile heureux, ça avait toujours été moi. Je riais et c'était fini, les gens me frappaient gentiment en souriant. Au final, c'étaient eux les imbéciles, à croire que l'imbécile heureux que j'étais était le vrai. Je ne pouvais pas nier qu'il y avait tout de même une part de mon caractère dans l'image que je montrais, mais, comme le mot le disait, c'était une image. Je ne montrais qu'une partie de moi ; au fond, ce n'était pas moi. Moi, c'était aussi bien cet imbécile heureux que ce gars lunatique qui ne savait pas pourquoi est-ce qu'il était encore en vie. Difficile de se faire face quand on se considérait comme une merde, alors je préférais me dire que j'étais juste l'imbécile heureux. Je tournais toutes mes pensées vers ça, je finissais par me censurer moi-même. Stupide, hein ? Je n'étais pas l'imbécile heureux pour rien.

Je bus mon café. Mon café était bien trop amer. Je ne l'aimais pas. J'avais pourtant ajouté du sucre, non ? Pourquoi ne passait-il pas bien dans ma gorge ? Comme un fou, je continuai pourtant de le boire. Comme si je voulais me taire, en fait. C'était une excuse pour ne pas en dire plus. Je venais de tout déballer à mon petit-frère, et je n'étais pas fier de ce que j'avais fait. Si je le pouvais, je voudrais ajouter du sucre dans son café pour qu'il oublie tout ce qu'il venait d'entendre. Mais ce serait revenir en arrière. Ne pas assumer ce que j'avais fait. Alors que l'objet de cette discussion, c'était d'assumer nos propres passés, et, ensemble, d'aller de l'avant. Lui, assumant son passé avec le père, moi, assumant mon passé « noir ». Si nous voulions marcher droit devant nous, il fallait qu'on assume nos propres défauts. Je ne pris donc pas la peine de chercher à verser du sucre pour embellir la chose. Jaehyuk devait entendre les choses comme il le fallait. Lâchant enfin mon café, ayant déjà bu la moitié de ma tasse, je laissai perdre mon regard sur la nappe. C'était une nappe que je voyais tous les matins et qui habituellement, ne me faisait pas grand chose. Dans ce cas pourquoi est-ce qu'aujourd'hui, elle réussissait à me rendre nostalgique ? Étais-je nostalgique du temps où je vivais en cachant mon passé à Jaehyuk ? Oui, certainement. Parce que désormais, ce sera terminé. Et l'image qu'il avait de moi serait à jamais changée.

« Wahou, mon frère c'est vraiment quelqu'un. »

J'écarquillai des yeux. Je les levai ensuite sur mon frère, et ce que je vis sur son visage me pétrifia. Un sourire. Un grand sourire, même. Des yeux qui brillaient de sincérité. Un flot d'émotions envahit mon cœur, alors que je déglutis pour les réprimer dans mon cœur. J'avais du mal à croire ce que je voyais, ce que j'entendais. Lui était fier de... moi ? Non, ce n'était pas possible. Pourquoi serait-il fier de moi alors que moi-même, je n'arrivais toujours pas à assumer ce passé alors que ça faisait des années qu'il était révolu ? Je ne comprenais pas sa logique. Trouvant ça complètement ridicule, il n'y eut qu'un rire désabusé qui sortit de ma bouche, comme si je prenais ça pour une blague même si je savais que ce n'en était pas une. « Qu'est-ce que tu racontes... ? » murmurai-je, sous le choc. Pourquoi arrivait-il à l'accepter aussi facilement ? Je m'étais toujours fait à l'idée qu'on ne pouvait pas accepter un tel passé de ma part après avoir cru que j'étais un imbécile heureux. Était-ce parce que c'était mon frère ? Parce que, même avec les longues années de séparation, il y avait toujours ce lien de sang qui nous unissait ? Il y avait mon sang en lui comme il y avait son sang en moi. Ainsi, nous arrivions à nous comprendre, à avoir une réelle relation entre frères quand ça ne faisait qu'un an et plus que nous avions repris contact. C'était comme si nous avions rattrapé les années qui nous avaient séparé... Enfin ce n'était pas encore fini. Il nous restait encore tant de chemin à parcourir, et, aujourd'hui, je sentais que nous avions tous les deux fait un grand pas en avant.

Il me remerciait. Je n'arrivais même pas à accepter ses remerciements. Pourquoi est-ce qu'il me remerciait ? Qu'est-ce que j'avais apporté de bon dans sa vie ? J'avais l'impression d'être celui qui faisait tout foirer, justement. Il ne m'aimait pas quand nous étions petits, et maintenant, j'étais la cause qui lui faisait couper les ponts avec le vieux. Il aurait très bien pu vivre une vie paisible avec lui, à la tête d'une entreprise, la tête haute et le dos droit. Je l'aurais détesté mais ça n'aurait pas eu d'importance, ma haine aurait été comme un moucheron qui volait dans la nature pour lui. Il aurait été si heureux et accompli, alors comment pouvait-il me remercier ? Aveuglé par ma propre monstruosité, je n'avais pas remarqué qu'aux yeux de mon frère, j'étais beau. Je mordis ma lèvre inférieure, une boule à la gorge dû aux émotions qui commençaient à dépasser le seuil de mon cœur, tandis que Jaehyuk continua. C'était vrai. Le père était une mauvaise personne. Il n'offrait pas une vraie famille à Jaehyuk. Personne n'avait besoin d'un tel bonheur. Je pensais peut-être l'inverse avant, mais c'était fini, maintenant. Je savais désormais qu'on ne pouvait pas être heureux quand on fréquentait le père. Il considérait les gens comme des objets, comment aurais-je pu penser que Jaehyuk puisse être heureux avec lui ? J'étais idiot. Ce n'était pas le père sa famille, mais moi. Et le père n'était pas non plus ma famille : c'était lui. On s'échangeait notre amour mutuel, on avait une relation parfaitement saine. Une relation normale entre frères, en fait. Jaehyuk but le café amer, et ne me laissa pas parler ; il reprit immédiatement. Je serrai dans ma main ma tasse, réellement ému par tout ce qu'il me disait. Je n'avais même plus la force de manger quoi que ce soit, j'avais une trop grosse boule dans la gorge pour qu'elle me permette de manger quelque chose. Même boire le café me semblait trop difficile. Je buvais, à la place, les paroles de mon petit-frère qui me révélait son passé. Ni lui ni moi n'étions des monstres. Tous deux, nous étions humains.

Je laissai traîner un silence après ses aveux. Pas parce que je ne trouvais rien à dire, mais parce que je cherchais à faire disparaître cette boule de ma gorge. Je n'avais pas envie de lui parler avec une voix tremblotante. Seulement, je n'y parvins pas, les émotions étant trop fortes. Alors, merde. « Merci, Jaehyuk. » dis-je d'une voix faible, tout simplement. Et je crois que ça suffisait pour exprimer toute ma reconnaissance. J'étais reconnaissant envers ce petit-frère qui était là pour moi, pour me rassurer et pour m'ouvrir les yeux alors que ça devrait être l'inverse. C'était moi le grand-frère, ici. Pourtant, j'avais déjà l'impression qu'il était si mature. Mon propre petit-frère ne cessait de m'impressionner de jour en jour. J'étais vraiment content d'avoir accepté de continuer à le voir, ce jour-là. J'étais vraiment content de son retour dans ma vie. J'étais vraiment content de l'avoir à mes côtés. J'étais heureux de sa présence, tout simplement. Je lui esquissai un petit sourire, puis finis mon café. Non pas pour me taire, mais pour avaler ce passé amer. Et aller de l'avant.

Ensemble.
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