Les premiers bruits sont assourdissants et je suis forcé de me déconcentrer pour en trouver la source. Une alarme suspend le combat dans lequel j’étais une fois de plus entraîné pour sauver la fille de mon patron et je me permets de baisser une seconde le canon de mon arme pour écouter les paroles hurlées dans les rues plus peuplées au loin. Rejoindre un bunker ? Mes sourcils se froncent, que se passe-t-il pour qu’une telle alarme résonne dans toute la ville aussi fort ? Je réfléchis une seconde mais me rappelle rapidement qu’une telle alarme ne doit signifier qu’un certain danger qui ne me rassure pas. Je me tourne vers les membres de mon équipe puis vers la jeune fille que je suis censé protéger au péril de ma vie. J’ordonne ensuite le repli en reculant pour prévenir Mee Joo qu’elle ferait mieux de suivre ce que les hommes plus loin conseillent et se rendre dans un bunker. Elle accepte, enfin, je suppose qu’elle préfère ne pas prendre de risques et c’est pour cela qu’elle ne proteste pas. Je me charge de couvrir ses arrières puisqu’il semble que nos ennemis ne soient pas inquiétés de l’alarme assourdissante continuant de résonner dans les rues. Rapidement, les coups de feu se taisent pour ne laisser à mes tympans que le bruit aigu me rappelant le danger qui semble bien réel. Je me redresse, quittant ma position de tir, pour vérifier que les survivants de cette confrontation ne sont que mes hommes et une fois cela fait, je leur ordonne d’eux aussi se mettre à l’abri, on ne sait jamais s’il est réel ou pas.

Solitude retrouvée et plus marquée que d’habitude, je marche dans les rues à présent vides et je ne croise que les hommes vêtus de gilets jaunes qui ne cessent de me conseiller de me rendre au bunker le plus proche au plus vite. Mes cheveux sont aplatis à cause de la pluie battante qui ne cesse depuis que l’alarme s’est déclenchée et je me dirige à mon tour vers un des bunkers depuis si longtemps installés dans la ville. Celle-ci semble déjà dangereuse bien que je n'ai pas été blessé par les premiers assauts et cela me pousse donc à presser le pas, sachant qu'il ne me reste que peu de temps avant de voir les portes de tous les bunkers se clore. J’aperçois l’entrée de l’endroit alors que celle-ci commence à se refermer et me mets alors à courir sous la pluie froide frappant mon visage aux joues rougies. Mes pieds frappent le tarmac mouillé et ma course peu étonnamment rapide me permet de me glisser dans l’ouverture et laisser se refermer derrière moi les portes grises de l’endroit. Je suis sans aucun doute le dernier à y être entré. Une pièce rudimentaire se dévoile devant moi et y sont installés d’autres personnes dont les visages me sont inconnus. Deux d’entre eux sont amochés mais assez faiblement et je constate que deux autres sont sains et saufs comme je le suis. Ils tournent leurs regards vers moi et je me contente de m’incliner légèrement en guise de salutation , murmurant un glacé "Bonjour" avant de m’appuyer, un peu en retrait, contre un des murs froids du bunker où nous sommes à présent tous enfermés… Ensemble pour une durée qui m’est désagréablement inconnue…

Mon regard parcourt la salle dans laquelle je suis enfermé. Je n’aime pas le fait que je ne connaisse personne, je ne supporte pas le fait d’être confiné sans savoir ce qu’il se passe à l’extérieur, sans savoir où les personnes avec qui j’étais et que je suis censé protéger sont en ce moment. Si le danger est réel, ça pourrait s’avérer très grave d’être à l’extérieur des bunkers lors de l’attaque. Je passe une main dans mes cheveux, je ne peux rien faire et cette impuissance me met presque hors de moi sans pour autant que je ne le montre. Je croise des regards, j’ai l’impression que personne ne sait ce qu’il faut faire. Je jette un coup d’œil à ma montre et constate que le temps risque d’être vraiment long. Ce genre d’alerte, selon mes connaissances, peuvent se prolonger dans le temps plus qu’on ne le pense et ça ne m’arrange pas.
Je me redresse finalement, personne ne prend d’initiative et je suppose que c’est parce que personne ne sait ce qu’il faut faire dans ce genre de situation. Mon esprit de survie s’éveille un peu et bien que face à des inconnus, je n’ai pas réellement de pouvoir, j’imagine que rester sans rien faire n’est pas la meilleure des solutions. Je passe une main dans mes cheveux et me racle la gorge pour m’éclaircir la voix alors que je prends la parole dans ce silence trop pesant.

-Nous devrions voir s’il y a des provisions en suffisance pour plusieurs jours…

Je commence puis mes yeux se déposent sur une blessure, un bras en sang qu’il faudrait soigner. Je dépose mon sac à dos à côté de moi et en sors une bouteille d’eau et une couverture dont je déchire un long bout pour m’en servir comme pansement. Je m’approche de la jeune fille en ignorant le rouge sur mes joues probablement dû au fait que je ne sois pas à l’aise.

-Je peux te soigner ? Ça n’a pas l’air grave mais mieux vaut prendre des précautions.

J’attends sa réponse et me tourne vers une jeune fille ayant répondu à ma salutation d’une voix assez forte. Ses traits me sont familiers mais je ne m’y attarde pas, préférant me concentrer sur la situation assez problématique dans laquelle nous nous trouvons tous ensemble pour le meilleur comme pour le pire.

-Je ne te force à rien mais… Est-ce que tu peux aller voir pour les provisions, s’il-te-plaît ?

Je ne suis pas trop froid, ayant l’impression que ceux avec qui je me trouve sont assez déstabilisés par le fait que l’on soit tous enfermés pour une alerte dont on ne sait rien à part que cela peut être réellement dangereux…