ootd// Des verres qui s'enchaînent, la musique pour continuer de valser dans cette vie qui ne te ressemble pas, qui ne t'as jamais ressemblé d'ailleurs. De l'alcool pour oublier et les autres pour observer. Un spectacle qui n'en fini pas. Une scène qui se répète jour après jour. Tes jambes qui vascillent et ton esprit qui se perd lentement au fur et à mesure des heures sombres qui s'écoulent. T'es plus vraiment en état de jouer à la fille de bonne famille, puis ça fait si longtemps que t'en as plus envie. Tout paraît plus simple avec ces verres que t'enchaine. T'en oublie la soirée à laquelle t'es venue t'exhiber, t'en oublie les gens autour de toi, un léger sourire sur les lèvres. Preuve d'une naïveté certaine face à ce que tu fais.
Et ce visage de poupée en a émerveillé certains ce soir. Cette candeur qui te caractérise en attire plus d'un, mais tu ne le remarque pas vraiment. T'es ailleurs, pourtant ton regard continue de se poser sur ces gens autour de toi. Une main qui passe dans tes cheveux, qui laisse découvrir un jeune homme installé sur le tabouret à côté. "Je t'offre un verre ?" entends-tu, tes lippes s'étirant un peu plus. C'est généralement comme ça que ça commence. Un regard, une phrase. Ça peut paraître anodin, mais ça réchauffe toujours un peu ton cœur, sans que tu ne saches pourquoi. Et tu oses, comme si tout ça n'était qu'un jeu, même si au fond de toi, tu sais que t'es déjà en train de perdre. "D'accord." finis-tu par répondre, avec si peu de malice mais des étoiles qui font briller tes yeux.
Et la conversation se fait. Un peu brouillée, parfois insolite. Un deuxième verre devant toi, puis un troisième, alors que tu sais que tu ne devrais pas. Tu finis par te lever, titube. T'aurais envie de rester là, pourtant tu ne devrais pas. Te dis que tu fais encore une connerie, mais t'as malgré tout envie de voir jusqu'où tu peut aller. Surtout t'as pas vraiment envie de rester avec lui. T'as envie de retrouver les quelques proches qui sont venus avec toi. Tu le remercie d'un sourire, part te cacher dans la foule. Tu ne sais pas où tu vas, tu laisses l'alcool te porter n'importe où. Mais lui n'en démord pas. Tu le vois à son allure, sa façon de t'avancer vers toi. Une main qui se serre sur ton bras, et ton sourire qui disparaît. "Non, j'ai pas envie." lâches-tu si peu sûre de toi. Une panique certaine qui te prend sans que tu ne saches quoi faire. "Allez viens, fais pas ta gamine, j'te ramène." grogne cette voix en face de toi. Et tu te mets à gigoter, tentant maladroitement de te défaire de son emprise. Tes sourcils qui se froncent, et la peur de ne pas finir la soirée indemne. "Lâches-moi ! Je veux pas venir avec toi." Tu ne saurais trouver aucune excuse, et la seule pensée qui te vient, c'est que t'aurais besoin d'un miracle pour te sortir de là.

L’esprit qui se perd et l’euphorie qui fait vibrer les coeurs ; il n’y avait pas meilleur endroit que les soirées pour se sentir vivre selon Haru. Dernièrement, elle s’est souvent sentie morte, spectatrice de sa propre vie sans jamais pouvoir se raccrocher à la réalité et elle sait qu’elle a besoin de contact humain et social lorsque ça lui arrive. C’est pour ça qu’elle avait rejoint une soirée de fin de semaine avec ses amies pyo, profitant de son entourage rassurant pour boire un peu plus que son habitude et s’aventurer un peu plus loin dans ses discussions et nouvelles rencontres. L’expression plus chaleureuse, elle profitait de ces quelques heures qui lui étaient bénéfiques avant de se sentir vide à nouveau. Les quelques grammes d’alcool en plus dans son sang ne se remarquent pas ; à vrai dire, freckles tient plutôt bien l’alcool. Elle a une morphologie plus ronde que les coréennes et un mental en acier, suffisamment pour contrer les effets toxiques de de toutes les liqueurs sucrées qu’elle avait eu le plaisir de goûter ce soir.


C’est juste une soirée comme une autre, le type d’ambiance dont elle avait besoin. C’était sans compter que comme dans toutes les soirées, il y a toujours un moment ou un autre où ça tourne mal : pas pour elle, non, car freckles a toujours eu le don pour se tenir loin des problèmes malgré sa façon de vivre parfois trop dangereuse. Ce soir, une voix féminine l’interpelle parmi la foule de monde qui dansait ou se regroupait pour discuter. Le regard vitreux, l’alcool dans son sang ralentit le processus mais elle parvient finalement à déterminer à qui cette voix appartient et quel était le problème. Encore un gars lourd qui veut profiter d’une fille un peu trop ivre. Avec un léger soupir et portée par la frustration éthylique qui grondait maintenant en elle, Haru se rapproche et sans se poser de question, vient enlacer la demoiselle en détresse. “ Yewonie, où t’étais passée ? Tu m’as tellement manquée mon amour.  “ Embrumée par l’éthanol, c’est la seule idée qui lui était venue à l’esprit : jouer les petites amies pour éloigner le parasite. Elle offre un sourire à la concernée en essayant de lui transmettre par le regard de jouer le jeu avant de se tourner en direction du garçon pour l’accueillir avec un regard sombre. “ ça te dérangerait de lâcher ma copine ?“ Presque menaçante, elle ne relâche le regard que lorsque le concerné lâche finalement le poignet de la jeune fille. Haru ne la connaissait pas tant. Elle connaît son prénom, sait qu’elle fait partie de la même frat qu’elle. Qu’elles ont probablement des amies en commun. C’était suffisamment de raisons qui l’avait poussée à agir de cette façon. Elle se détache finalement de l’autre fille lorsque le gars est assez loin et c’est avec une expression neutre qu’on lui connaissait mieux qu’elle observa Yewon et lui demanda un simple.

“ ça va ? “

Ce genre de situation pouvait être assez traumatisante mais surtout, Yewon avait l’air d’être beaucoup moins résistante à l’alcool que la japonaise.

Tu devrais le savoir, que tout ça c'est pas pour toi. Que l'alcool te rend bien plus vulnérable que tu ne l'es déjà. Que les risques sont bien plus grands au fur et à mesure des verres que tu prends. Mais au fond de toi, t'as envie de croire que t'en as besoin. Que tout ça finalement, n'est qu'un moyen de plus pour énerver tes parents. T'as beau être prête à tout pour qu'ils te remarque, tu ne pensais pas te mettre autant en danger pour eux. Pour que de simples mots puisse passer la barrière de leurs lèvres. Pour un geste attendrissant à l'encontre de leur dernier enfant. Et t'es là, emprisonnée dans ce malheur qui n'en finit pas. Dépourvue de ta faculté à réfléchir correctement, prête à passer sous le feu de ce monstre qui te retient. Ton cœur tambourinant dans ta poitrine n'est qu'une douleur de plus, et tu ne saurais remettre tes idées en place pour t'échapper de cette sentence.
Puis vint ce miracle, auquel tu croyais pas. Voilà ta sauveuse, celle qui, en quelques syllabes à peine, laisse le bourreau te relâcher. Tes yeux crient la surprise et la peur. Que tout ça ne soit qu'une illusion et qu'il réapparaîtra à un moment où à un autre. "Je te cherchais mon cœur." et tu entres dans le jeu de la jeune femme, ta main s'aggripant à elle, comme une évidence, ton visage se tournant vers elle pour lui offrir un sourire malheureux. Et voilà qu'il s'en va, que sa silhouette disparaît à travers la foule. Et voilà que tu respires à nouveau. De longues secondes à te persuader qu' il ne reviendra pas, et ton attention se reporte sur ce miracle devant toi. "Je... Merci" oses-tu à peine murmurer, lâchant à ton tour le bras de la demoiselle. Toujours sous le coup de l'étonnement, mais aussi et surtout cette panique qui continue d'envahir ton corps, tu ne saurais comprendre exactement ce qu'il vient de se passer. Perdue, à bout de souffle. "Je sais pas ce qu'il s'est passé..." Pour qu'il en arrive à croire que tu le suivrait, que tu étais bien plus docile que ce que ton minois peut laisser penser. Une main qui passe dans tes longs cheveux, un soupire qui s'échappe d'entre tes lèvres. Ton regard se pose finalement sur le sol, désemparée. Comme si tout cet alcool avait disparu de ton organisme par cette scène. "Je crois que j'ai besoin d'un verre d'eau..." Voilà tes derniers mots avant de tenter d'avancer d'un pas. De tes jambes qui tremblent, tu trébuche d'une maladresse enfantine, te rattrapant à Haru, encore une fois. Et une perle d'eau qui glisse sur ta joue, avec une simple question qui s'enfonce dans ton esprit, presque malsaine : qu'as-tu bien fait pour tomber si bas ?

Tu ne sais même plus ce qui t'as poussé à boire autant ce soir, ce qui t'as fait accepter ces verres d'un parfait inconnu. Il n'est pas le premier à t'avoir abordé par hasard, ne sera pas le dernier non plus. Mais souvent, tu ne prends pas autant de risques, ne part pas comme tu l'as fait avec lui. Tout semble si flou et si net à la fois. Ton regard perdu n'ose plus se poser sur la foule, préfère rester concentré sur la demoiselle venue te sauver. Dieu sait ce qu'il aurait pu se passer et cette simple idée te donne de nouveaux frissons, incontrôlables. L'air impassible d'Haru te réconforte autant qu'il te terrifie. Tu te doutes que certains observant la scène te jugent sans savoir ce qu'il s'est réellement passé, sans savoir ce qui t'as poussé à finir comme ça. Et tu serais la première à faire de même en temps normal. Alors les mots te manquent. Pour remercier celle qui te rattrapes une fois encore, celle qui te rassure comme elle peut. Pour exprimer ce qui se passe en toi. Parce que tu ne saurais décrire ce que tu ressens à cet instant. Une larme qui parcourt ta joue avant de s'écraser au sol, que tu laisses couler sans y prêter attention. Tu la laisses replacer ces mèches de cheveux qui cachent ta vue, alors que ton regard lui, reste planté sur celle que tu considères être ton miracle.
Difficilement, tu finis par suivre la demoiselle, dans un silence sourd. La musique ne parvient plus à tes oreilles. La foule autour n'est qu'un obstacle que tu ne comprends pas. Tu finis par te rattraper à ce bar, comme la fin d'un calvaire, récupère ce verre d'eau que tu bois, lentement. Tu te redresses fébrilement pour t'asseoir sur un tabouret libre alors que tes yeux cherchent encore Haru. "Il... est encore là ?" demandes-tu, une certaine hésitation dans la voix. T'as peur de la réponse autant que tu veux savoir, finalement. Ta tête se fait douloureuse, comme un cauchemar qui n'en finit pas. Tout te semble dérisoire à cet instant, et la seule chose que tu arrives finalement à faire est de garder ton attention sur elle. "Yewon," mimes-tu de tes lèvres, tentant de te courber à ton tour. Mais tu sens que tu divagues, attrapes ton visage entre tes mains pour être sûre de ne pas sombrer. "Je t'ai déjà vue au dortoir non ?" arrives-tu finalement à demander, cette impression que toute énergie a quitté ton corps. "Merci..." un murmure de plus, la peur omniprésente que t'aimerais taire mais qui reste là, alors que la seule chose censée que tu te sens capable de faire est de terminer ce verre devant toi.