Belle journée ; le soleil brillait depuis plusieurs jours déjà, apportant un peu de joie aux étudiants qui se promenaient sur le campus malgré les températures glaciales. Et ses cours de la journée finissant en début d’après-midi, Beomho faisait partie de ceux qui iraient profiter d’une lecture sous un rayon de lumière dans les jardins de l’université. Belle journée, mais pas pour tout le monde. Alors qu’il descendait les escaliers de son bâtiment, les yeux fixés sur le grand ciel bleu à travers les fenêtres, le silla entendit des petits pas pressés dévaler les escaliers. Une marche par une marche ou deux par deux, une chose était sûre dans l’esprit de Beomho : c’était dangereux de courir ainsi dans des escaliers. Et l’univers lui donna raison quand il vit les pieds de l’étudiant glisser sur une marche et celui-ci tenter de se rattraper. « Oh mon dieu ! » souffla-t-il en voyant la figure masculine devant lui commencer à tanguer dangereusement vers l’avant au milieu de cette cage d’escaliers. Et ce fut la chute – littéralement. Beomho observa impuissant le jeune homme trébucher sur les dernières marches, avant de dégringoler les quelques mètres qui le séparaient du sol du premier étage la tête la première. Ses propres paupières se plissèrent, alors même qu’il n’était pas la victime de cette sale chute, mais l’imagination lui suffisait à ressentir la douleur à l’arrivée en bas. La grimace sur son visage se dessina d’elle-même alors qu’il s’obligea à sortir de sa stupeur pour venir en aide à ce pauvre étudiant. Et le silla avait beau réfléchir encore et encore, il n’arrivait pas savoir comprendre – comment, pourquoi l’étudiant avait fait une telle chute. Il avait du mal à visualiser comment cela avait pu lui arriver mais soit, cela lui arrivait également de se retrouver dans les situations les plus improbables sans même savoir pourquoi. « Tu vas bien ? » demanda-t-il en s’approchant d’un pas rapide du garçon. Beomho s'accroupit à ses côtés en examinant d’un long regard le corps du jeune homme ; il fallait avouer qu’il ne s’était pas loupé. Après avoir inspecté les plaies apparentes sur la peau pâle, le brun fouilla dans son sac à dos pour y trouver sa petite trousse de secours – pas grand-chose, mais il pourrait au moins désinfecter les blessures du jeune homme. « T’inquiète pas, je suis secouriste. » déclara-t-il avec une certaine fierté, tout le monde n’avait pas la chance de tomber sur une personne compétente après une chute pareille. Sauf qu’en l’occurrence, ‘compétente’ était un grand mot ; parce que ce que Beomho ne disait pas, c’était qu’il n’avait jusque-là jamais eu besoin d'utiliser son diplôme de secouriste. Quelque part, au fond – vraiment au fond – l’étudiant était sûr de se souvenir, de savoir comment utiliser toutes ses connaissances théoriques pour aider ce pauvre jeune homme.

T'arrivais pas vraiment à savoir comment t'avais fait. Ta journée s'était bien déroulée jusque là, et c'était sans doute un signe que tu aurais dû comprendre. Tout se passait trop bien, et dans ta vie, ce n'était pas bon signe. Encore moins normal. Tu ne t'étais pas cogné une fois depuis le réveil, tu n'étais pas tombé. Tu ne t'étais pas grandement fait mal – et plutôt que de comprendre que l'univers t'envoyait un signe en te disant de faire attention, t'y voyais une simple façon de mieux profiter de ta journée entière. Car ça se passait moins bien d'habitude. Beaucoup moins bien. Pas que t'étais du genre à te faire mal au quotidien mais au moins un peu. Même légèrement, ça arrivait souvent. Et aujourd'hui, rien. Sauf cette chute qui te propulsait en bas des escaliers beaucoup plus vite qu'espéré. Tu ne savais pas pourquoi : le vent, un moustique ou parce que tu regardais le ciel au lieu de regarder tes pieds. Tout était possible, finalement. T'étais bien le genre à trébucher sur le vide – à force, il était presque préférable de ne plus chercher à comprendre mais tu le faisais quand même. Bêtement. La rencontre avec le sol était douloureuse. Trop douloureuse. Un son plaintif passa entre tes lèvres alors que ta vision humide tentait d'apercevoir qui te parlait. Tu te redressas dans une longue grimace, un « Aïe » passant tes lèvres, tes prunelles sur le jeune homme. « Ca fait mal », commentas-tu, reniflant, les lèvres tournées vers le bas. « Je sais pas... je pensais... », tentas-tu de t'expliquer, reniflant encore. T'osais même pas bouger tant ton corps te paraissait lourd et douloureux. Tu reniflas une nouvelle fois, la douleur visible sur ton visage, ton regard s'humidifiant un peu plus. Tu l'observas subitement, le regard brillant : c'était ton jour de chance, finalement. « Merci beaucoup », articulas-tu lentement, une larme roulant sur ta joue. « Je sais pas comment ça s'est passé j'ai dû glisser. Pardon », tentas-tu de te justifier, mauvaise habitude qui ne partait pas. « Est-ce que c'est grave ? », demandas-tu. « Ca fait vraiment mal... », répétas-tu encore. Tu suivais chacun de ses mouvements. « Est-ce que je saigne ? J'aime pas quand ça saigne parce que ça pique », marmonnas-tu, la lèvre inférieure tremblante.

Peut-être que s’il avait eu des super reflexes ou encore s’il avait été super rapide, Beoms aurait pu lui empêcher cette affreuse chute. Mais le fait était là, il n’était ni l’un ni l’autre et il n’avait pas pu empêcher cette chute spectaculaire de se produire. À défaut, le jeune homme avait d’autres qualités bien sûr, et pas des moindres en l’occurrence. Tout le monde ne pouvait pas se vanter de disposer d’un diplôme de secourisme, et oui, Beomho n’en était pas peu fière. « J’étais derrière et wouah… C’était impressionnant comme chute. » déclara-t-il en venant en aide au catastrophé. « Je suis presque étonné que t’ais pas pire ! ». Il ne rata pas le ‘aie’ couiner entre les deux lèvres, et vraiment, en tant que témoin de la scène, l’étudiant en sciences de l’éducation ne pouvait que compatir à la douleur. Heureusement que le garçon se trouvait en présence d’un secouriste digne de ce nom. Car malgré le manque d’entrainement, Beomho était sûr que c’était comme le vélo, les bons gestes ne s’oubliaient pas. Un sourire rassurant se dessina sur son visage alors qu’il posa délicatement la main sur l’épaule de la… victime. « Ne t’excuse pas, les jours de malchance arrivent. » et puis bon, ce n’était pas comme si cela gênait qui que ce soit ici. Beomho était plus que ravi d’aider un camarade et les autres étudiants autour avaient rapidement repris leur route après quelques hoquets de surprises et quelques murmures. Inspectant de haut en bas le garçon, il fixa avec inquiétude la masse bleutée sur la jambe pâle. « Non, non, ça ne saigne pas du tout. » répondit-il en vitesse, un peu désorienté devant les larmes du jeune homme. Il avait pourtant l’habitude de gérer les plus jeunes, mais des enfants plutôt. « Enfin pas vraiment ou pas à l’extérieur en tout cas. » reprit-il, parce que si c’était bleu, c’était qu’il y avait eu légère hémorragie interne localisée. Mais sans danger – enfin, il croyait. D’après ses souvenirs, lointain. Assez lointain. Mais tant que ça ne coulait pas partout, c’était ok non ? « C’est violet. ». Belle observation qu’il se sentit obliger de partager. « Et ça gonfle à vu d’œil. ». Deuxième observation qu’il lui fallut partager avec son patient. C’était plutôt bon signe mais il n’était pas totalement certain non plus. « Hm, j’espère que ce n’est pas cassé… » souffla-t-il plus pour lui que pour le garçon à ses côtés. Il posa son doigt sur l’hématome avant d’appuyer un peu. Finalement, ses deux mains se rejoignirent sur la cheville du garçon. « Ca fait mal si je fais ça ? » demanda-t-il avant de bouger un peu la cheville de droite à gauche en essayant d’être délicat. Essayer étant le mot-clé. C’était la cheville violette la priorité d’après lui, les petites ouvertures sur ses bras étaient plus que secondaire pour le secouriste en puissance.

Le sol semblait t'apprécier un peu trop, t'attirant toujours vers lui. Ce n'était pas que tu ne l'appréciais pas, il était après tout le seul présent, toujours là pour t'accueillir quand tu te vautrais mais... ça faisait mal. Les pommettes rougissantes aux mots du jeune homme tu détournas le regard, timide mais surtout honteux, te doutant bien que la chute avait dû être spectaculaire à regarder. Une sorte de gag prévu – alors que pas du tout. T'aurais préféré, dans le fond. « Ah oui ? », demandas-tu, crédule, clignant des paupières mais grimaçant bien vite quand la douleur revint. Elle revenait toujours, et par vagues plus ou moins intenses. Comme pour te rappeler que tu venais de te vautrer royalement mais aussi pour te montrer que tu étais encore vivant. Que la chute ne t'avait pas blessé trop grièvement. « Je dois avoir de la chance dans mon malheur, je suppose », marmonnas-tu doucement, l'air confus mais aussi peiné parce que ça faisait mal. Tu avais connu pire, en soit, et t'allais t'en remettre. Tu t'en remettais toujours en général. « Ca m'arrive bien trop souvent », répondis-tu sans hésitation, le visage un peu moins rayonnant, presque blasé par la constatation. Ca t'arrivait bien trop souvent ce genre de choses. De tomber, de te faire mal, d'avoir un bleu, plusieurs bleus. De te couper avec tout, rien, de trébucher sur l'air. Tu savais pas pourquoi, t'avais jamais compris et tu comprendras sans doute jamais non plus. C'était un mystère. Tu étais ton propre mystère – et c'était gênant. « Ah ouf... », tu soufflas, soulagé tout de même, inquiet de perdre du sang sans le savoir. Tu clignas des paupières à ses paroles suivantes, le fixant dans un air brusqué, et déboussolé. « Co-comment ça pas vraiment ?? Comment ça pas à l'extérieur ? », demandas-tu, de plus en plus inquiet, les paumes palpant le haut de ton corps. T'étais pas du tout rassuré. « C'est bien que ce soit violet ? », que tu l'interrogeas précipitamment, de plus en plus inquiet. « C'est pas bien que ça gonfle ? », tu te pinças les lèvres dans une grimace, un son plaintif dans la gorge. « Pas cassé ? Je peux pas avoir une cheville cassée », ça allait être dérangeant. « Ca fait mal », que tu confirmas, la lèvre tremblante, le regard humide. « Elle est cassée ? Ou juste foulée ? », tu préférerais juste foulée pour être honnête. Tu reniflas discrètement. « J'ai mal partout en fait », en même temps, vu la chute... « Je vais pouvoir guérir pas vrai ? Vous pouvez m'aider, n'est-ce pas ? », demandas-tu pour te réconforter, te disant qu'il pouvait t'aider. « Est-ce que je dois aller à l'hôpital ? », ça semblait nécessaire mais tu préférais demander. « Je vais pas mourir... hein ? », que tu l'interrogeas d'une petite voix, la frimousse apeurée, trop pâle et le regard bien trop humide. « Ca ira mieux demain pas vrai ? Je pourrais marcher normalement demain, hein ? », tu reniflas, le fixant, l'inquiétude dans les prunelles.

Il lui semble que l’une des premières règles est de ne pas paniquer. Beomho ne panique pas – jamais, même – mais il ne peut pourtant pas en dire du jeune homme. Il faut dire que peut-être, mais vraiment peut-être l’étudiant n’est pas bon avec les mots. « Ce que je veux dire, c’est qu’il y a pas d’hémorragie externe. » parce que comment mieux expliquer les choses qu’en employant les mots exactes. « L’hémorragie interne ça se voit au scanner… » continue-t-il, indiquant maladroitement que finalement, ce n’est pas lui qui peut faire identifier un tel cas. « … je crois. ». C’est bien son problème à vrai dire, Beoms croit savoir beaucoup de choses, probablement parce qu’il est censé savoir et qu’il a envie ; mais la réalité est bien différente. Il y a des choses simples pourtant qu’il est certain de pouvoir identifier et expliquer. « Euh, euh, le violet ça indique juste qu’il y a eu un coup, rien de dramatique. ». Il espère en tout cas, car des bleus c’est un peu violet aussi et bon, il en a eu aussi des poignets foulés et tout qui viraient au violet suite à l’impact. « Hm, les inflammations ça veut rien dire. Ou tout dire, ça dépend du point de vue, je suppose ? . ». Au pire, il s’agit d’un mensonge non-volontaire, il espère que le garçon ne lui en tiendra pas rigueur. Il inspecte à nouveau la cheville en sale état. « Je sais pas ? Si ça fait mal c’est pas hyper super méga bon signe… Mais faudrait voir un médecin pour confirmer. ». Il grimace, il sent bien qu’il s’enfonce. Et qu’il n’aide pas l’étudiant à rester calme. Beomho l’entend renifler en couinant, une fois, deux fois, trois fois. Non, pas ça, pitié. Enfin, l’étudiant en sciences éducatives a l’habitude des grosses larmes et tout ce qui va avec. Mais avec des enfants, pas avec des jeunes adultes. « Pleure pas, pleure pas c’est rien. ». La bonne technique c’est le bisou magique, cela marche à tous les coups. Mais cela marche à tous les coups pour les moins de huit ans, comment on fait alors pour les moins de trente ans ? « Enfin, je veux dire tu vas pas mourir en tout cas ! ». Peut-être la seule chose dont il est absolument certain. Et d’ailleurs la remarque est un peu dramatique, s’il peut donner son avis. Il se mord la lèvre, anxieux sous les pupilles brillantes et inquiètes du garçon. « Je pense pas qu’il faille attendre demain cela-dit… ». Et probablement qu’il faut oublier l’idée de se promener en sautillant dans les couloirs de l’université au moins pour les deux prochaines semaines. Mais Beomho se tait sur ce point. « Tu devrais aller à l’hôpital pour pas empirer le truc… », parce que ouais, l’idée n’est pas de transformer une simple cheville foulée en cheville cassée. Ce serait dommage. Est-ce pour autant cela vaut le détour par l’hôpital ? Peut-être pas, mais il vaut mieux prévenir que guérir. Ou en tous cas, de plus devoir guérir encore. « Attends ! Je peux te faire un bandage en attendant pour maintenir la cheville, puis t’accompagner aux urgences ? » il sourit. Ce n’est pas tous les jours que Beoms assiste à une chute pareille. Et heureusement, le jeune silla avait principalement prévu d’étudier à la bibliothèque et de finir un projet. Que de choses non urgentes qui ne l’empêchent aucunement de jouer au super héros. Et d’enfin mettre en application des magnifiques connaissances de secouriste. En considérant que bancale et magnifique soient des synonymes, cela va de soi. « Je peux te porter jusqu’à là-bas ! ». Probablement que physiquement il en est incapable, mais il a l’envie, le dénouement. Tout ça, quoi.

C'était vraiment gênant de se faire mal partout et tout le temps comme ça t'arrivait. Tu devrais avoir une trousse de secours sur toi – et étonnamment, t'en avais pas. Pourtant t'étais le premier à en avoir besoin. Tu avais bien quelques pansements dans ton sac, au cas où. Il t'arrivait souvent de te couper avec tes livres. T'avais aussi quelques médicaments, car tu avais parfois mal à la tête. Mais sinon rien de plus, rien de moins. C'était déjà bien assez, pas vrai ? « Ah.. c'est une bonne chose alors pas vrai ? », t'étais pas doué en médecine mais tu savais que c'était positif.  Tu saignais pas à foison, au moins. Tu voulais te concentrer là-dessus et voir le positif en te répétant que tout allait bien – même si t'avais mal. « Je dois aller faire un scanner ? », est-ce que ça voulait dire que tu pouvais mourir ?? Lui jetant un regard, tu mimas un air effrayé. « Tu crois ? », chuchotas-tu. Il croyait quoi, que ça se voyait au scanner ou que tu en avais une ?? Devais-tu t'inquiéter ? « D'accord donc violet c'est normal », résumas-tu dans un petit mouvement de la tête. Violent, tout allait bien. Ca montrait juste que tu t'étais fait mal et rien de plus. T'avais l'habitude de voir des bleus sur ta peau, ça te choquait plus réellement... mais là, tu devais bien avouer que t'avais un peu peur. Un peu beaucoup, même. Tu pensais être sauvé en tombant sur lui et pour le moment t'avais surtout peur et t'étais pas beaucoup rassuré. « Ca dépend du point de vue... de qui ? », osas-tu demander en clignant des paupières dans un air crédule. Le tien ? Le sien ? Celui du médecin ? De qui exactement ? Devais-tu continuer à t'inquiéter ? « Pas bon signe », que tu répétas, le regard dans le vide, le palpitant cognant trop fort. « Mais tu as dit.. que c'est pas bon signe... », que tu dis, le regard humide, la lèvre tremblante et l'air de plus en plus apeuré. Tu reniflas doucement. « C'est vrai ? Promis ? », demandas-tu bêtement, l'espoir renaissant. Mais t'avais toujours peur. Tu bougeas un peu le visage, reniflant encore une fois. « Tu penses ? », le questionnas-tu d'une petite voix. Les joues quelque peu colorées, tu bougeas le visage de haut en bas. « Je veux bien c'est gentil », offris-tu timidement, lui lançant un regard reconnaissant. « Mais je veux pas t'embêter. Tu dois avoir des choses, je peux y aller tout seul... je pense », murmuras-tu, gêné. T'allais pas lui demander de t'accompagner. T'allais pas le forcer à le faire. C'était déjà gentil de sa part de t'aider. « Me porter ? Oh non », tu agitas les mains, le rouge collé aux joues à présent. « Pas besoin de me porter, je veux pas te faire mal. Je peux marcher », assuras-tu sans en être totalement convaincu. Tu mêlas les gestes à la parole, tentant de te relever, l'équilibre et toi n'étant pas vraiment en bons termes, tu basculais d'un côté puis de l'autre telle une balance mal équilibrée. C'en était presque effrayant à regarder. « Ca va, je gère. Je vais bien », tu gérais absolument rien du tout. Mais t'allais pas non plus le forcer à te porter, tout de même... Tu avanças de mieux que tu le pouvais vers l'endroit qu'il avait indiqué, des petits « Aïe » sifflant contre ta bouche. « Je vais bien », lanças-tu, manquant de te rétamer encore une fois, te rattrapant à lui de justesse. « Pardon », et tu rougis encore. « Ca va ? Je vais bien », lui assuras-tu encore.

« Non ! » non, non, non, pas de scanner. Enfin pas dans l’immédiat, peut-être que le médecin ou les médecins en feraient un – si jamais Chanhee décide d’aller aux urgences cela va de soi. Mais de son côté Boemho ne peut que lui conseiller, donc il dit toujours ‘on n’est jamais trop prudent’. Cela doit être son point de vue de secouriste ou de baby-sitter, il n’est pas trop sûr. En tout cas, à son humble avis, il n’y a rien de dramatique à cette blessure – juste une sale foulure qui doit être immobilisé quelques jours. Ou quelque chose dans le genre. « Oui, violet c’est tout à fait normal. ». Le jeune homme a l’air bien trop sûr de lui pour quelqu’un qui a du mal à se rappeler de ses gestes de premiers secours. Mais c’est comme le vélo, n’est-ce pas ? Ca se ne s’oublie pas les gestes de premiers secours ? Genre c’est un instinct, des réflexes. Et pendant trente secondes, Beoms se demande pourquoi son instinct est si mauvais, là tout de suite. « D’un point de vue de secouriste volontaire. » une réponse qui ne le mouille pas trop en l’occurrence. Qui souligne qu’il n’est en aucun cas un professionnel de santé, juste un gars qui veut bien faire. Et… qui ne fait pas assez bien à priori vu la réaction de son ‘patient’. L’étudiant va finir par croire que c’est plus facile de gérer les enfants que les jeunes adultes si cet échange continue. « C’est pas bon signe mais ce n’est pas non plus grave. Pas bon signe dans le sens où faut pas continuer à courir sur ta cheville ? ». Ouais, parce que dans ses qualités supérieures de secouriste, Beomho se dit que cela risque d’empirer les choses, mais au fond, c’est du bon sens. Faut croire que tout le monde n’en ait pas doté. « Tu vois ce que je veux dire ? ». Oui, non, peut-être – tant que ces petits yeux larmoyants se stoppent. Beomho n’a pas le cœur assez solide pour survivre à une bouille aussi enfantine et adorable. Alors il fait tout pour calmer Chanhee ; comme il fait avec les enfants, les promesses. Des promesses un peu en l’air et il espère que cela n’aurait aucune répercussion. Une cheville foulée, cela ne peut pas être si grave ? Si ? « Promis, je suis sûr que c’est pas très grave. ». Une chose est sûre pour autant, il serait bon de voir un vrai professionnel de santé qui pourra confirmer (ou non) ces propos. Et pour cela, direction l’hôpital le plus propre. Aider le jeune homme parait logique pour Beomho quand il comprend qu’il faut éviter de solliciter la cheville. Mais Chanhee ne semble pas du même avis. « Ca me dérange pas ! » . Alors qu’il tangue visiblement devant ses yeux, Beoms garde ses mains tendus devant lui pour rattraper une possible grosse chute. Une par jour, n’est-ce pas suffisant ? « T’es sû- ». Pas loupé, le blessé manque une nouvelle chute et finit par se rattraper. Si le silla manque de se laisser entrainer dans la chute, il tient bon et aide le garçon à se redresser. « Je devrais au moins t’aider à marcher. ». Alors il se place de telles façons à soulager la cheville de Chanhee en passant le bras de celui-ci autour de sa nuque côté cheville blessé. « Essaies de t’appuyer le moins possible sur ta cheville. ». Les prochains mètres sont longs et pas les plus simples que Beoms a connu dans sa vue mais cela lui fait plaisir d’aider quelqu’un en difficulté. Puis vraiment son prochain cours n’est pas si intéressant – il espère juste que son professeur comprendre l’urgence de la situation. « Faut qu’on trouve un bus maintenant ! ». Quelle belle analyse et observation, qu’il aurait probablement du avoir il y a plusieurs mètres déjà au lieu d’apprendre d’être au milieu du campus comme un idiot. « Euh, l’hôpital le plus proche c’est lequel ? ». Pendant quelques secondes c’est le vide. Hôpital campus. Hôpital campus. « C’est quel ligne de bus… ? ». Est-ce qu’il n’y a pas un hôpital sur le campus ? Après tout, ils ont bien des étudiants en médecin dans cette université, non ? Gros doute sur la question. Il n’a jamais eu besoin d’aller à l’hôpital avant ou pas dans la précipitation comme cela. « … Je pense qu’il faudrait appeler un taxi, ou…. Une ambulance, peut-être ? On a un médecin sur le campus ? ». Une belle brochette de questions. À ce rythme, ils ne sont pas prêts d’arriver aux urgences.

Tu te disais que tu allais le croire. Il t'aidait, il semblait savoir quoi faire.. alors il devait avoir raison pas vrai ? Tu te disais que oui. Ca ne pouvait être que ça. Il savait ce qu'il faisait alors tu devais écouter. T'avais connu ce genre de chutes bien trop souvent mais tu préférais le croire. Un peu. Presque. S'il te disait que le violet c'était normal, alors c'était normal. N'est-ce pas ? Oui. Bien sûr. « Ca doit être compliqué », dis-tu dans un chuchotement. D'être secouriste volontaire. Tu pourrais pas le faire, toi. Parce que t'étais trop maladroit, tu finirais par tuer quelqu'un en voulant le sauver. Ce serait bien trop contraire au sens même du métier, même volontaire. Tu devais tout de même avouer que tu prenais peur. Plus les secondes défilaient et plus t'avais l'impression que la situation t'échappait totalement. T'avais le cœur qui cognait et tu savais pas si c'était à cause de la peur de la chute ou la peur de l'après chute. Peut-être les deux. « Je cours pas », précisas-tu dans une petite moue. Non, clairement, là, tu pouvais pas. Même si tu le voulais. T'arriverais pas à faire un mètre sans retrouver le sol. « Un peu. Je crois... », t'étais pas trop sûr de réellement tout comprendre. Tu devais juste pas courir et c'était pas bon signe de courir. Mais le reste, tout allait bien, en gros ? Tu clignas des paupières, perdu et un peu apeuré en imaginant brusquement le pire. « D'accord, je te crois alors », dis-tu en reniflant discrètement. Ce n'était pas grave, tout allait bien se passer. Tu étais accompagne, c'était une chance ! « Je veux pas te faire mal », parce que ce serait quand même plutôt con que vous vous retrouviez à deux par terre, et blessés. Tu pourras le porter et lui ne pourra pas non plus le faire. Gênant. Tu manquas cependant de te retrouver au sol à nouveau. « C'est gentil », que tu commentas, prenant appui sur lui mais pas trop. « Je vais essayer », tu te pinças les lèvres, concentré, essayant de suivre le conseil. T'avais l'impression d'être un faon qui apprenait à marcher. Tu hochas le visage à sa constatation, levant le regard. «On est où ? », lui demandas-tu pour seule réponse, un peu perdu dans tes repères. « Tous les chemins mènent à l'hôpital de toute façon », tu réinventais un classique. « Je pense pas que l'ambulance viendra pour un bleu à la cheville », enfin, du violet. Bleu. Tu savais plus. « On peut aller à l'infirmerie du campus sinon ? », proposas-tu, un peu gêné. « C'est plus près. Et ils ont des bandes normalement », t'avais juste besoin de ça après tout non ? « Au pire le médecin du campus pourra m'aider à aller à l'hôpital. Je vais pas t'embêter aussi longtemps », tu voulais pas le déranger jusqu'à ce que tu sois à l'hôpital, il avait déjà bien aidé. « Ou alors il y a le taxi, oui », dis-tu, songeant à ses mots. « Ce sera encore plus simple, le taxi. Non ? Enfin faut le payer et je suis pas sûr d'avoir assez », tu te massas rapidement la tempe. « Je crois que le bus c'est celui qui vient de partir », merci Chan Hee.

Ce qui est compliqué au fond, c’est l’incompétence. Ou du coup, l’incapacité a ce souvenir de ce qu’il a appris lors de ses différents stages de secouristes. Un secouriste volontaire n’est pas un médecin – ce que Beom serait bien de ne pas oublier. Le jeune silla prend alors des pincettes pour expliquer – ou rattraper tout du moins la situation. Et tant mieux, il a envie de dire si Chanhee ne court pas, hein. Même si Beomho a bien envie de faire une petite blague sur le fait qu’il a bien vu qu’il courait pas et que c’est d’ailleurs pas prêt d’arriver de si tôt, mais il sent que ce serait mal venu. Le but n’est pas de provoquer une crise de larmes, ce ne serait pas très professionnel de sa part. Et peut-être que cela mériterait qu’on lui retire son diplôme de secouriste… Autant éviter alors. Ainsi, il se satisfait d’entendre que Chanhee comprend, un peu. C’est mieux que pas du tout, et c’est suffisant pour que tout le monde garde son calme – l’essentiel, en somme. La seconde phase d’un bon sauvetage est de faire en sorte que la victime arriver jusqu’à un professionnel de santé adéquat. Pour cela, faut-il encore savoir vers qui se tourner dans ce cas-ci, et réussir à y arriver. Si Beomho n’est absolument pas dérangé par le fait de porter le jeune blessé, il comprend que ce n’est ni idéal pour son dos, ni pour le concerné. Malgré les complications, Chanhee parvient finalement à se hisser sur ses deux pieds (ou un pied et demi ?) avec son aide. Beomho sait que son rôle est celui d’un soutien, d’un pilier et il le prend très à cœur – prêt à traverser la ville pour déposer son blessé à un médecin. Pour autant, il ne sait pas où, ce n’était pas écrit dans les slides de la formation : ‘quels professionnels et où les trouver dans le cas d’une cheville foulée sur le campus de yonsei ?’. Sinon il s’en serait souvenu, évidemment. « À yonsei. » répond-t-il bêtement. Cela ne répond pas d’ailleurs à la question en soit, car yonsei… c’est grand. Il a peut-être une carte du campus sur son tel, sur l’application de l’université, mais est-ce vraiment utile ? Sachant qu’ils ne savent même pas où ils vont ? « Les chemins, ok mais les bus et le subway ça marche pas, si ? » car il est un peu près sûr que l’expression c’est tous les chemins mènent à rome et rome c’est quand même très loin d’ici, trop loin. Il y a forcément un médecin ou hôpital plus proche. « On a une infirmerie ? » ou encore une infirmerie… Pourquoi est-ce qu’il n’a jamais été mis au courant qu’il y avait une infirmerie sur le campus ? Quel outrage. Les choses auraient été bien plus simples ainsi, ou si Chanhee lui avait dit plus tôt. Surtout qu’il a l’air de bien la connaître cette infirmerie. « Comment tu sais tout ça ? Ca t’arrive si souvent que d’y aller ? » ; ce qui n’étonnerait finalement pas du tout Beomho. Il a encore bien en mémoire (presque imprimé à vrai dire) la chute de Chanhee, c’est peut-être quelque chose de récurrent… Le garçon le coupe dans ses réflexions internes et Beom regarde le bus en question n’éloigner sans pouvoir rien y faire. « Le bus vers l’hôpital ? » demande-t-il pour confirmation en soufflant discrètement. Car au pire, maintenant, ils ont l’option infirmerie qui ne s’envole pas avec le bus. Normalement en tout cas, Beom n’est plus sûr de rien en toute honnêteté. Il ne sait même pas où est cette fameuse infirmerie en fait. « Bon, on va à l’infirmerie alors… C’est par où ? ». Il aide a nouveau le blessé à se redresser et à s’appuyer sur lui, prête à prendre la route. « Je te suis, enfin, non je te tiens mais tu me guides ! » ajoute-t-il maladroitement. Il espère juste que ce n’est pas trop loin, car malgré toute la volonté du monde, sa forme physique n’est pas adaptée pour porter un demi-poids d’homme sur plusieurs kilomètres.

T'en arrivais presque à ne plus savoir si tu devais être inquiet ou au contraire, soulagé, qu'il se soit arrêté pour t'aider. Bien sûr, tu étais reconnaissant. Combien de fois était-on passé à côté de toi sans faire attention ? Trop pour que tu puisses réellement compter. Et tu pouvais comprendre, ça devait être gênant d'aider quelqu'un qui venait de tomber à cause de rien. Ou alors tu devais probablement donner l'impression d'être influencé par l'alcool et évidemment, ça devait en dissuader plus d'un à venir te tendre la main. Quelques personnes le faisaient, heureusement, et tu leur étais grandement reconnaissant. Comme ce jeune homme aujourd'hui. C'était gentil de sa part de s'être arrêté, de t'accorder de son temps et de te conseiller, de te soigner.. mais tu t'inquiétais un peu, aussi. Juste un peu. Tu comprenais sa démarche, sa façon de faire et tu essayais de te rappeler qu'au moins tu n'étais pas seul. Qu'il était venu t'aider. C'était agréable de ne pas être seul. Se concentrer sur le positif, ne pas retenir les question (même si tu en avais beaucoup). Tu allais te concentrer sur le positif et uniquement le positif et te rappeler sans cesse qu'il s'était arrêté pour te donner un coup de main. Il n'aurait pas été obligé mais il l'avait fait. Le positif. Que le positif. « A Yon... », que tu commenças avant de t'arrêter. Oui bien sûr. Où pensais-tu être. Tu levas le pouce, le remerciant en silence. Tu étais donc sur un terrain connu. Plus ou moins. T'étais juste un peu sonné par la douleur, la chute, la peur et toutes ces questions qui étaient encore là – même si tu tentais de te concentrer uniquement sur le positif. « Les métros et les bus empruntent des chemins dans l'absolu … non ? », tu clignas des paupières, penaud. Etait-ce le moment de philosopher là-dessus ? Probablement que non. Pourtant tu posais réellement la question. Quand tu parlais de chemins, tu parlais de chemins en général. « Vers le grand hall », expliquas-tu. « J'y vais souvent, je connais le chemin les yeux fermés », te confias-tu, un peu trop fier même si tu devrais pas, les pommettes colorées malgré tout. « Enfin quand je sais d'où je pars », et là tu savais pas où tu partais, en fait. « A l'infirmerie ? Ou à l'hôpital ? », c'était pas très rassurant que tu poses la question non ? « J'allais déjà plus souvent à l'hôpital. J'y vais moins en ce moment, je pense que je suis sur la voie de l'amélioration », et tu lui offris un sourire, presque content de toi. « Uh uh » dis-tu simplement pour confirmer. « C'est plus simple, oui » et beaucoup moins loin. Observant longuement les alentours, tu tentas de te repérer. « Je suis un peu le gps ? », demandas-tu, crédule, avant de rire discrètement, grimaçant un peu quand ton pied toucha le sol. Tu gardas le silence à nouveau, contemplant les environs. « Par ici. On doit remonter les escaliers, ensuite continuer ton droit. On devra tourner à gauche quand le chemin se divise, à côté du grand arbre. Puis encore tout droit. On arrive vers l'entrée et là faut aller au grand hall et on y est quasiment », tu bougeas le doigt, traçant des lignes invisibles avant de sourire, le pouce levé. « Ca ira pour toi ? Sinon je peux sautiller jusque là-bas », l'informas-tu dans un petit mouvement du visage, commençant à avancer. « Je l'ai déjà fait », lui soufflas-tu après quelques secondes. « C'est un peu long mais je l'ai déjà fait.. c'est vraiment long », murmuras-tu, le regard vers le sol, vide, les souvenirs te rendant presque pâle. « Mais vu qu'on est deux on ira deux fois plus vite donc ça prendra deux fois moins de temps »