Il y pensait souvent. Beaucoup trop souvent même. Il se disait qu'il avait été bien faible de se laisser aller comme ça dans ses bras. Et la seconde suivante, il songeait que malgré tout cela lui avait plu. Puis encore après, il se traitait de pauvre imbécile. Il voulait oublier. Il fallait qu'il oublie et qu'il laisse ça derrière lui. Il n'avait plus envie que Macsen le hante comme ça parce que ça le rendait fou et que sa consommation d'alcool augmentait considérablement à cause de cette histoire. Il s'était donc retrouvé à accepter un rencard avec un client de la librairie. Quand il lui proposa, il était à deux doigts de lui dire qu'il se faisait des idées sur son compte et que non, il n'était pas homo mais se ravisa lorsque l'image de Macsen effleura son esprit. Cela s'était présenté comme une bonne occasion de passer à autre chose, de remplacer ce souvenir d'une partie de jambes en l'air par un autre. Il poussa la porte du bar déjà bien alcoolisé. Et pour une fois, il avait fait un petit effort vestimentaire.  Il chercha du regard le fameux jeune homme et le trouva assis au comptoir. L'endroit était bondé ce qui le fit légèrement grimacé. Il n'aimait pas quand il y avait trop de monde. Il se sentait observé. Il s'installa aux côtés de son prétendant et commanda immédiatement une bière.
A sa grande surprise, le rendez-vous se déroula plutôt bien. Il le trouvait intéressant. Il avait même l'air d'être un mec bien. Leur discussion était animé. Parfois il posait sa main sur sa cuisse au approchait un peu plus son visage. Malheureusement pour l'autre, Isaac n'avait aucun désir de construire réellement quelque chose. Il voulait juste passer sous ses draps et fin de l'histoire. Il risqua alors un regard par-dessus son épaule et c'est là qu'il remarqua la présence de Macsen. Aussitôt, il sentit son cœur s'affoler. Pourquoi fallait-il que lui aussi soit ici ? Il prenait ça pour de la malchance, sacré malchance.

Il pria de tout son cœur pour que Macsen reste à sa place avec sa bande de potes qui devait être de la même espèce. Il tenta par tous les moyens de rester concentré sur ce que son rencard lui racontait sauf que cela devenait difficile. Il n'arrêtait pas de jeter des coups d’œil vers la table où Macsen se trouvait. Son pauvre prétendant lui demanda même si tout allait bien et Isaac bredouilla que oui, qu'il avait juste un peu trop chaud. Mais cette fois quand il chercha du regard Macsen il ne le retrouva pas et pour cause il venait de se lever pour le rejoindre. La scène se passa trop vite pour qu'il puisse réagir tout de suite. Il se figea après avoir senti ses lèvres sur les siennes. Son cœur s'affola dans sa poitrine. Il n'arrivait pas à y croire. Mais pour qui se prenait-il ? Qu'est-ce qu'il voulait qu'il n'avait pas déjà eu ? Isaac ne comprenait pas qu'il ne passe pas à autre chose, après tout y avait de quoi faire dans ce bar. Le temps que son cerveau se remette à tourner correctement, l'autre était déjà entrain de s'énerver cherchant à savoir ce qu'il se passait. Isaac ne lui prêtait aucune attention. Son seul souci c'était Macsen qu'il bouscula plutôt violemment pour qu'il retire ses sales pattes de son corps. « C'est toi qui est encombrant. Dégage putain. » Il le foudroyait du regard. Il n'y avait que lui qu'il contemplait avec tant de haine. Quel sentiment étrange et puissant. Mais ce qu'il se passait entre eux suffit à déstabiliser l'autre type qui finalement quitta les lieux en insultant le libraire. Isaac ne tenta pas de le retenir mais le fixa jusqu'à ce qu'il sorte du bar. Il poussa un long soupir et passa une main dans ses cheveux. « Tu peux retourner avec tes petits camarades maintenant. » Il prit sa bière qu'il vida cul sec comme pour évacuer sa colère.

Lui briser le cœur ? Isaac leva les yeux au ciel avant de pouffer rire. Comme s'il en avait un. Ce mec là n'était qu'une ordure qui ne savait penser qu'avec ce qui se trouvait entre ses jambes. La preuve encore avec sa main baladeuse que le libraire ôta tout de suite d'un geste brusque. Cela faisait quelques secondes seulement qu'il était là mais déjà il avait l'impression d'étouffer. Ce mec lui pompait toute son oxygène. Il fit même fuir l'autre. Cependant, Isaac ne se mit pas à courir pour le rattraper et cela voulait bien dire ce que ça voulait dire pas vrai ? À la place, il termina sa bière pour en réclamer une autre. Il comptait boire jusqu'à oublier cette nouvelle soirée que, visiblement, il allait passer avec Macsen : pot de colle de première classe. « Tu sais que tu vas te gâcher ta soirée là ? » Le barman lui apporta son verre et Isaac en avala plusieurs gorgées avant d'à nouveau regarder l'américain. « Je ne veux pas de toi. » Et pourtant. Saviez-vous que le pied d'une personne part dans le sens de son centre d'intérêt ? En l’occurrence, celui d'Isaac était tourné à Macsen. Cela signifiait que quelque part il n'était pas totalement fermé au dialogue. S'il l'était, ne serait-il pas déjà parti depuis longtemps ? Après tout, rien ne le retenait là, avec ce salaud. Il n'avait d'ailleurs pas brisé le contact de leurs genoux. « Pourquoi tu penses qu'à ça ? » C'était une question qu'il se posait et qu'il posa sans trop réfléchir. Il n'attendait pas particulièrement de réponse.

Pourquoi restait-il là ? Avec ce pauvre mec, ce salaud, ce con fini qui n'en avait que pour son cul. Il ne savait pas. Alors qu'un flot d'insultes lui traversait, il restait là, avec lui. Il aurait pu partir mais il avait décidé de rester. Quelque chose le retenait inconsciemment avec ce mec qu'il n'aimait pourtant pas. Il termina sa biere en un temps record et commanda la même chose que Macsen ensuite. Il lui avait donné envie puis il allait avoir besoin de plus fort qu'une biere s'il voulait tenir. Il ne baissa pas les yeux lorsqu'il croisa son regard. Il était surpris par sa réponse. Il ne pensait pas qu'il allait avoir droit à une réflexion serieuse sur le sujet. Il s'attendait à ce qu'il en profite pour lui rentrer dedans encore une fois ou bien qu'il allait lui raconter de la grosse merde. Certaines réactions ? Et là, pourquoi engageait-il une conversation ? L'alcool surement. Cela déliait les langues, facilitait le contact et rendait les gens plus intéressants. Il soupira avant d'avaler la totalité de son verre et d'en réclamer un autre au barman. C'est facile de baisser hein. Plus facile que d'assumer. Il ne parlait bien sur pas seulement de lui à ce moment là. Il etait sur que comme tout le monde Macsen avait ses faiblesses aussi.

Isaac fit une petite moue comme s'il approuvait tout ce que l'étudiant en journalisme venait de lui dire. Il le croyait. Il ne voyait surtout pas pourquoi il lui mentirait, après tout ce qu'il lui disait ne faisait pas franchement rêver, mais quelque chose le dérangeait. Plus que sa présence, c'était cette intimité qui s'installait entre eux qui le perturbait. « Ce sont les lâches qui fuient et qui ne sont pas capables d'assumer. » Isaac se comptait dedans évidemment. Il savait que c'était lâche de sa part que de se laisser marcher dessus par ses parents et leurs principes. Il avait conscience que c'était idiot de se cacher derrière la religion. Au final, il s'en servait presque comme une excuse. N'était-ce pas plus simple ainsi ? Il avala son deuxième verre et leva la main pour demander le troisième. Avec tout ce qu'il avait déjà bu aujourd'hui, son rapport à la réalité se trouvait de plus en plus déformé. Il n'avait plus totalement les idées. La remarque, tout à fait juste malheureusement, de Macsen le fit même pouffer de rire. Il se mordit la lèvre inférieur pour se calmer et approcha son visage de l'autre américain. « T'es pas juste une merde pour moi. Tu vaux rien. Les mecs comme toi sont les pires et ils finissent seuls parce que personne en veut vraiment. » Il haussa ensuite les épaules avec ce petit air innocent qui allait si bien avec le reste de son visage et posa son index sur le nez de Macsen. L'alcool prenait dangereusement et petit à petit possession de sa raison. « C'est bien de baiser mais à part ça comme tu sers à rien d'autre baaaaaah pouf. » Les explications très claires d'Isaac, volume 1. Il reprit ses distances et descendit son troisième verre en le regardant dans les yeux.