Il marquait un point. L'être humain était ainsi fait. Il inclina la tête sur le côté comme s'il lui accordait effectivement qu'il avait raison là-dessus. Isaac avait eu le temps de se rendre compte de ça. Il était l'un des plus lâches, l'un des plus peureux. Croire en Dieu ne l'aidait en rien à améliorer ça. Il ne comprenait pas que ses parents puissent avoir une si grande confiance en ce qu'il préparait pour eux. Isaac n'arrivait pas à saisir ses plans pour lui. Il était tellement paumé. Il haussa les épaules quand Macsen rappela une autre évidence. « J'ai jamais prétendu que je ne l'étais pas. » Il trouvait tellement plus simple de noyer ses angoisses dans l'alcool. La vérité étant qu'il ne se remettait pas de ce que ses parents lui avaient fait vivre. Il culpabilisait de sa propre existence. Probablement qu'il était dépressif mais boire l'empêcher de totalement sombrer parce que cela lui donnait la sensation d'avoir le contrôle sur ses sensations. « Personne ne veut vraiment finir seul. Je ne te crois pas. L'être humain n'est pas fait pour vivre seul. T'es juste un peureux comme les autres. » Il prononça cette dernière phrase en le regardant dans les yeux. Il se demandait de quoi un homme comme lui pouvait bien avoir peur et ce qui se cachait derrière ce qu'il voulait bien laisser voir. Il le laissa s'approcher sans ciller et fronça les sourcils. « Non. Ce qui me perturbe c'est que tu ne veuilles pas lâcher l'affaire. » Et c'était la vérité. Il voyait bien pourquoi il s'était laissé avoir par ce mec. Il le trouvait beau, attirant. Il ne pouvait plus tellement le nier. Macsen savait ce qu'il faisait. Il était capable de dominer et lui, il s'était juste laissé faire. Fatigué de lutter contre ses pulsions, contre ses envies. Seulement, cela n'empêchait pas qu'il le détestait. Mais puisqu'on dit si souvent que de la haine à l'amour il n'y a qu'un pas, probablement que l'on peut dire la même chose de la haine et du désir.

Peut être bien qu'il avait raison. En fait, il avait même totalement raison. Il ne pouvait pas comprendre. Il ne le connaissait pas. D'ailleurs, ils ne pouvaient pas se comprendre parce qu'ils ne se connaissaient pas. Ne pas vouloir être amoureux, rester seul. Autant de choses qu'il ne concevait pas qu'il mettait pourtant également en pratique. Comme Macsen, il se protégeait en se murant dans sa grande tour de solitude. Il était plutôt bien là-haut. « Tu n'es pas seul ? » Il posait la question sans attendre de réponse. Pour lui, Macsen avait tout du mec seul justement. Lui-même avait tout du mec seul mais c'était voulu, désiré. Sa réplique suivante le froissa et son cœur se serra douloureusement. Il termina son verre d'un coup, verre que le barman avait apporté sans même lui demander. Il devait avoir cerné son client. « Toi non plus, tu ne peux pas comprendre. C'est pas juste une question d'assumer ou non. » Si ce n'était que ça, le problème ne serait-il pas plus facilement réglé ? Isaac mettait beaucoup plus en jeu. Il risquait de perdre sa place dans sa famille, de perdre sa famille tout court en fait. Ce n'était pas si facile. Ce qu'il lui dit le fit doucement sourire parce qu'il marquait encore un point et que ça le faisait chier. « Je me demande bien pourquoi l'affaire est encore là. » Il se pencha au-dessus du comptoir comme un gosse pour appeler le barman qui s'était trop éloigné à son goût. Il lui réclama encore un verre en insistant pour qu'il dose un peu mieux la chose, et ponctua sa demande d'un petit clin d'oeil. En se rasseyant, il manqua de tomber du tabouret ce qui le fit rire nerveusement. Il cacha son visage avec sa main parce qu'il savait le spectacle pitoyable qu'il montrait. « Tu me raccompagnes après ? » Demanda-t-il comme s'il s'agissait de la chose la plus normale.

Qu'il lui dise pour qu'il puisse comprendre ? Isaac n'était pas sur de ce qu'il venait d'entendre. Et probablement que sa surprise se lisait un peu sur son visage mais il tenta de ne rien laisser paraître. Il plissa les yeux comme s'il voulait vérifier qu'il n'y avait pas un piège derriere. Apres tout, pourquoi s'intéressait-il ? Qu'est-ce que cela pouvait bien lui faire ? Il secoua alors doucement la tête. Il ne se voyait pas se confier à un inconnu. Encore moins à Macsen. Puis de toute façon cela ne regardait que lui, il n'arrivait pas à parler de ça car il avait honte de lui en plus d'avoir honte de sa famille. Ne fais pas comme si ça t'intéressait je t'en prie. Il soupira avant de réclamer un nouveau verre un peu mieux dosé en alcool et il sentait bien qu'il n'allait bientôt plus être en mesure de marcher. Il avait déjà du mal à réfléchir et encore plus à avoir les idées claires. Et il ne savait tellement plus ce qu'il faisait qu'il lui demanda de le raccompagner. Il ne put s'empêcher de rire un peu à sa réponse. Il termina son verre avant de se pencher en avant en posant ses mains sur les cuisses de Macsen. J'ai pas dit que je te faisais monter. J'ai pas dit que j'allais te faire monter. Je veux juste que tu m'aides à marcher. Il ne s'éloigna pas cette fois ci. Il préserva cette proximité. Ses yeux plantés dans les siens.

Isaac ne voulait tout simplement le croire mais surtout il n'avait pas envie de revoir son jugement. Il s'était fait une certaine idée de Macsen, du genre d'homme qu'il etait, il ne désirait pas vraiment le voir autrement. Imaginez qu'il lui découvre un coeur, ve serait le pompon. Puis dès qu'on s'approchait un peu trop de la corde sensible, Isaac avait tendance à se mettre sur la défensive. Il ne souhaitait pas se confier à ce propos. Personne ne semblait comprendre son dilemme de toute façon. Tu connais deja mon anatomie, je trouve ça amplement suffisant et tu n'as pas besoin d'en savoir plus de toute façon. Ce n'était pas comme s'ils allaient devenir amis de toute facon. Il ne fallait pas oublier qu'Isaac ne supportait pas ce salaud mais si à ce moment il avait lui-même l'air d'oublier ce détail. L'alcool devait aider puisqu'il lui demanda meme de le raccompagner. Il secoua néanmoins encore une fois la tête lorsqu'il insista sur le fait qu'il allait monter. Isaac refusait de faire monter qui que ce soit. Il préférait aller chez les autres et partir ainsi des que possible. Ce doit être triste pour un accroc du sexe de savoir qu'il ne va pas pouvoir tirer son coup ce soir. Il articula chaque mot avec exagération et s'approcha un peu plus pour le provoquer de façon à frôler ses lèvres. Puis d'un coup il se leva et balança l'argent sur le bar. Allez j'ai besoin que tu m'aides à rentrer. Il sentait bien les regards sur lui. Il ne tenait debout que parce qu'il restait appuyé au bar et ses joues étaient toutes rouges.

Il le regardait du coin de l'œil sans pouvoir s'empêcher de sourire parce qu'il avait une fois de plus raison. Il le traitait d'égoïste, de salaud, de con fini à chaque occasion et quand il se comportait enfin comme un être humain avec des sentiments, avec un coeur, il l'envoyait sur les roses. Mais c'était mieux ainsi. C'était sa façon à lui de se protéger surtout. Pourtant une question lui brûla les levres et il lui échappa. Tu t'intéresse à moi ? Lui demanda-y-il sans le regarder. Macsen n'était pas de so mauvaise compagnie dans le fond. Ou en tout cas l'alcool l'aidait plutôt bien à le supporter. Tellement bien qu'il se permettait de le provoquer et même de le chauffer. Malheureusement dans ce combat il savait qu'il n'avait pas nécessairement les armes pour l'affronter. Apres tout, Macsen avait déjà remporté une bataille. Il fallait qu'il reste sur ses gardes. Arrête de rêver. Il se leva difficilement tout en prenant appui sur le comptoir du bar. Il avait bel et bien besoin que quelqu'un l'aide à rentrer. Il passa son bras autour des épaules de Macsen et ne broncha même pas quand ce dernier glissa sa main sur son postérieur. Il grimpa dans la voiture et s'attacha bien sagement. Tout droit, gauche, gauche et au bout. Les grands buildings. Il mima ça avec ses bras pour représenter les immenses immeubles où il habitait. Macsen allait etre surpris car il est vrai que comme ça personne ne pouvait se douter qu'Isaac etait un gosse de riche lui aussi. Quel gosse de roche tient une librairie apres tout ?