21 décembre 1994 : malgré un déni de grossesse, elle voit le jour en parfaite santé au cœur de l’hiver. 1999 : effondrement d’un tunnel, elle fait partie d’une des victimes de cet incident alors qu’elle se trouvait dans un bus la conduisant vers Séoul. Elle est placée dans un orphelinat à Séoul où elle grandit sous la bienveillance des Sœurs. 2005 : un évènement caritatif s’organise à l’orphelinat, elle fait partie du chœur d’enfant et ne se doute pas que son père biologique la repère assis parmi les généreux donataires. Quatre mois plus tard, elle se fait adopter et vit désormais dans une résidence secondaire assistée d’un majordome et d’une gouvernante. Elle sourit et cache son sentiment de solitude. 2009 : scolarisée à domicile, les seules fois où elle sort est lorsqu’elle se rend chez son professeur de piano. Son chauffeur a une urgence et la dépose avec de l’avance, elle fait alors sa rencontre. Bien qu’elle ne voit pas son visage, il marque ses premières fois. 2011 : Elle recouvre la vue, tout lui semble désormais différent. Tout lui semble… terne. 2012 : L’effondrement d’un centre commercial défraie la chronique, l’entreprise responsable est celle de son père. Pour la « sauver », il l’envoie étudier à l’étranger. Elle devait partir pour Washington, mais elle décide d’étudier à Hawaï. 2016 : De retour en Corée sans pour autant avertir son paternel. Elle se cache et continue secrètement ses études, mais c’est sans compter le fait qu’elle tombe sur sa demi-sœur. Demi-sœur qu’elle perd lors de l’incendie de la Yonsei, cherchant à la protéger elle plutôt que de se protéger elle-même. été 2018 : Elle se croyait bien cachée mais en vérité, il la laissait simplement penser que c’était le cas. Sans qu’elle ait son mot à dire, elle est fiancée à Ma Jin Young.









« Mon enfer a commencé avec
vos bonnes intentions »

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Alors que ceux qui l’entourent ou la croisent ne peuvent s’empêcher de ressentir une certaine sympathie face à sa condition, pauvre enfant, ils ne soupçonnent pas qu’elle « voit » un tout autre monde. Le regard voilé sur le monde, mais un tout autre se dessine : rien ne lui est véritablement invisible, même lorsqu'il est bâti sur des mensonges. Chaque mensonge a sa couleur, sa forme, sa fragrance et avec le temps elle a appris à les voir, discerner, distinguer sans chercher pour autant à la pointer du doigt. Impuissante, seule, faible, elle ne pouvait que feindre de ne pas les « voir », les ignorer, les laisser la blesser pour endurer encore et encore. Qu’ils soient blancs, c'est ce qu'il y a de mieux pour elle, ou pernicieux elle n'en saura jamais rien de toute façon, empli de bienveillance ou d'intentions cruelles, ils laissent tous, sans exception, des traces. Qui dit indignation silencieuse, dit souffrance muette, plutôt que de s’en apitoyer et de se renfermer sur elle-même, elle a décidé de sourire coûte que coûte. Sourire pour cacher les mutilations subies par ces mensonges qu'importe leur nature, sourire pour se protéger ne serait-ce plus longtemps, sourire dans l’espoir qu’elle pourra vraiment le faire, un jour.

Elle se rassure, tente de tirer du meilleur de ses malheurs, mais elle tremble malgré elle, anxieuse de ne pas pouvoir recoller chaque partie de son âme lacérée par ces lames invisibles. Elle se voudrait plus courageuse, plus forte, mais elle n'arrive pas à chasser ses démons, tapis dans l'obscurité qui la dévore au point d'en oublier la couleur de la lumière. Ses prières lui ont semblé toujours vaines et les mises à l'épreuve de ce Dieu, miséricordieux ou vengeur, bien trop éprouvants. Rédempteurs ou punitifs, elle ne saurait en décrire la nature tant cela lui semble futiles. Endurer ou plus exactement subir, serrer dents et poings, voilà tout ce qu’elle pouvait faire. Le temps n'efface rien, il ne fait que la forcer à aller de l'avant.

Naïvement, elle pensait que si elle voyait le monde, comme tous les autres le voyaient, elle pourrait ne plus avoir à pleurer, éviter et esquiver chaque coup. Mais même en recouvrant la vue, le monde se révélait être encore plus sombre qu’elle ne l’aurait cru. Si par moment, des éclaircis se dessinaient, par les rencontres qu’elle faisait, elle réalisait à quel point, elle pouvait être, à tout moment, plus seule que jamais. Un malentendu, un regard, un silence, suffisait à être source de discord et la parole, une simple cacophonie. Plutôt que fermer les yeux, se résigner comme elle l’avait fait quasiment tout le long de sa vie, elle a commencé à se faire entendre, à dire « non ». Si à de nombreuses reprises, sa voix s’est faite étouffée, que ceux qui avaient l’habitude de la voir docile ont doublé d’effort pour la garder sous contrôle, elle a refusé de se soumettre, à s’excuser pour tout et rien. Pourquoi devait-elle toujours s’excuser, courber l’échine, se plier à leur volonté et éviter les conflits ? L’injustice l’étrangle, son regard ne dit plus qu’une chose : plus jamais ça.  

Pour autant, elle est loin de se douter que dorment encore certains mensonges. Autour de la personne de sa mère, qui l’aurait abandonné pour se venger d’un ancien amour qui ne cèderait pas à ses chantages, d’un premier amour qui lui aurait offert douceur et tendance qu’en échange d’argents, ou d’un père qui manipule et distord la vérité pour ne pas assumer le rôle du grand méchant.